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Printemps de la consommation responsable – N°1 : les textiles

Printemps de la consommation responsable – N°1 : les textiles Acheter un vêtement : un geste anodin… qui peut pourtant avoir de lourdes conséquences, souvent non visibles ! En effet, l’industrie textile est aujourd’hui l’une des plus polluantes au monde, et est également associée à une mondialisation synonyme d’exploitation de la main d’œuvre par un secteur majoritairement tourné vers une production quantitative plutôt que qualitative. De la production des fibres en passant par les étapes de fabrication et de confection jusqu’à l’épineuse question de la gestion des déchets, ses impacts sociaux, environnementaux, sanitaires et économiques sont majeurs.

Où sont fabriqués les textiles et vêtements vendus en France ?

Origine d’un produit : L’origine d’une marchandise est déterminée par le droit de l’Union européenne. Si le produit est entièrement obtenu dans un même pays, elle est facile à déterminer. Dans le cas d’un produit nécessitant des étapes de fabrication et de transformation dans plusieurs pays, c’est le pays de la dernière transformation substantielle – celle qui donne au produit sa forme finale – qui détermine son origine, et est désigné par l’indication « made in … » affichée sur l’étiquette.

Vêtements importés et production divisée par 2 en 20 ans

Entre 1996 et 2015, l’industrie textile française (habillement, fabrication textile, cuir et chaussure) a perdu 51 % de sa production et 66 % de ses effectifs salariés, qui ne sont plus que 103 000 aujourd’hui. Près de 87% des textiles, vêtements, cuir, chaussures, vendus en France sont importés, dont la grande majorité de Chine. La fin des quotas d’importation textiles en 2005 dans le cadre des accords de l’OMC a accéléré la tendance.

Un retour du « made in France » ?

Les productions françaises se concentrent actuellement principalement sur les secteurs du luxe et des vêtements techniques. Le « made in France » est pour l’instant moins plébiscité pour le secteur textile qu’alimentaire, du fait de son prix à l’achat. Cependant des marques se sont fait leur place, et d’autres se développent.

Made in France : Pour valoriser la production française et encourager des relocalisations, des labels ont émergé ces dernières années, tels que « France Terre textile« , qui garantit que 75% des étapes de fabrication sont effectuées dans les Berceaux Textiles Français au sein d’entreprises agréées, et apporte des garanties environnementales et de qualité.

Les conséquences de la fast fashion 

La fast fashion, et même aujourd’hui « ultra fast fashion » est synonyme de profusion de vêtements bas de gamme renouvelés à une cadence infernale, d’exploitation de la main d’œuvre, de disparition des savoir-faire traditionnels dans les pays dits développés ou moins développés, de pollution et de génération de déchets: un bien triste tableau!

Exploitation de la main d’œuvre et absence de conditions de travail dignes

Bangladesh, du miracle au mirage textile : Le Bangladesh, l’un des pays les plus pauvres au monde, compte aujourd’hui pas moins de 4000 usines textiles, employant près 4,4 millions de personnes. Le secteur représente 80% des exportations totales du pays. Le développement du secteur, lié aux mauvaises conditions de travail dans le pays et à l’existence d’une main d’œuvre très bon marché (0,32 centimes de dollar/heure) a été très largement encouragé par des institutions telles que l’OMC (Organisation Mondiale du Commerce), dont le Directeur général, tout juste un an avant la tragédie du Rana Plaza, félicitait le pays pour son industrie textile. Le 24 avril 2013, l’effondrement du Rana Plaza, ancien hôtel désaffecté utilisé comme usine textile a causé 1138 morts et plus de 2000 blessés, dont un grand nombre de femmes. Les travailleuses et travailleurs très précaires du secteur subissent actuellement une double peine avec la perte d’emploi liée à la crise de la Covid-19, se retrouvant démunis pour faire face aux dépenses de santé ou alimentaires, et plus généralement sans perspective d’emploi.

Travailler dans le secteur textile : bien souvent au péril de sa santé

Parmi les 2400 substances chimiques utilisées ou associées à l’industrie textile, 10% seraient potentiellement à risque pour la santé, et 5% dangereuses pour l’environnement. Mais un grand nombre n’ont pas été évaluées en termes d’impacts sanitaires ou environnementaux.  Les populations riveraines des usines textiles sont victimes de nombreuses et graves pollutions environnementales.

Femmes en première ligne : 80% des 75 millions de travailleurs/travailleuses dans le textile/cuir/chaussure dans le monde sont des femmes. Un très grand nombre d’entre elles est exposé à des produits chimiques aux effets délétères pour la santé : cancérogènes, causant des troubles du développement, de la reproduction, perturbateurs endocriniens, irritants, etc.

Destruction des savoir-faire traditionnels locaux

Au Bangladesh toujours, le savoir-faire de la mousseline traditionnelle, réputé pendant des siècles a été rendu moribond par le développement de la fast fashion : aujourd’hui, seule une poignée de tisserands subsiste, ne pouvant faire face à la concurrence des prix, et ne parvenant pas à trouver de successeurs. A son apogée dans le pays, l’artisanat de la mousseline traditionnelle comptait 4000 métiers à tisser pour 12 000 tisserands. Quant au pays occidentaux, les entreprises volontaires dans le domaine du prêt-à-porter butent sur la compétence de la main d’œuvre, et doivent recruter d’anciennes salariées expérimentées pour assurer une transmission de savoir-faire aux nouvelles générations.

Environnement : des conséquences néfastes à grande échelle

  • Les textiles sont la 4ème source la plus importante de pression environnementale après les aliments, le logement et le transport.
  • Le secteur textile est le 3ème secteur de consommation d’eau dans le monde, après la culture du blé et du riz.
  • Le coton est la principale culture consommatrice de pesticides dans le monde : fibre la plus vendue parmi les textiles naturels, il nécessite également de grandes quantités d’eau.
  • Le polyester, fibre synthétique issue du pétrole, est la 1ère fibre textile produite au monde, avec plus de 39,7 millions de tonnes en 2015.

Le consommateur final : maillon décisif de la chaine textile

Toujours plus de vêtements, et toujours moins cher !

  • 62 millions de tonnes de vêtements sont vendues dans le monde chaque année. Si la croissance actuelle se poursuit, ce chiffre augmenterait de 63% d’ici 2030, passant à 102 millions de tonnes.
  • En 2016, 62,1 millions de tonnes de fibres textiles synthétiques ont été produites, dont 54 millions de tonnes pour le polyester.
  • Dans l’UE, depuis 2000, la quantité de vêtements achetée a été multipliée par 2. En moyenne, une personne achète 60% de vêtements de plus qu’il y a 15 ans mais les conserve moitié moins longtemps.
  • En France en 2015, une moyenne de 7,3% du budget des ménages était consacrée à l’apparence physique, dont 41% (1230 euros) pour les vêtements, soit un tiers de moins qu’en 1960.

E-commerce et ses conséquences : La mode en ligne représenterait 1/3 de l’ensemble de l’ensemble du e-commerce. En 2015, 15% des ventes de vêtements étaient déjà réalisées en e-commerce. Avec la Covid-19 les achats en ligne ont explosé. Ils sont associés à des émissions de gaz à effet de serre liés au transport, particulièrement pour les achats livrés en 24h, les plus impactants. En outre, la précarité des métiers du secteur de la livraison qui y est associée est régulièrement mise en lumière.

Textiles et santé du consommateur final

Sans commune mesure avec les expositions professionnelles, les expositions du consommateur ne sont pas pour autant à négliger. La réglementation évolue régulièrement, mais lentement. Ainsi, Depuis novembre 2020, 33 substances CMR (cancérogènes, mutagènes, reprotoxiques) supplémentaires sont interdites dans les textiles au contact direct de la peau fabriqués et vendus dans l’UE. Mais des progrès restent à faire.

Sensibilisation cutanée et allergies : On estime à 5 millions le nombre de personnes sensibilisées à des substances présentes dans les textiles, telles que le formaldéhyde, colorants, chrome VI, nickel, cobalt, etc. Près de 180 000 nouveaux cas de sensibilisation cutanée seraient dénombrées chaque année. Il devient ensuite nécessaire d’éviter pour la vie l’exposition à la substance en question pour éviter une réaction allergique. La restriction de l’usage de 1000 substances sensibilisantes cutanées dans les textiles, cuirs, fourrures et peaux est en cours d’adoption au sein de l’UE : prévenir les allergies liées permettrait d’économiser au moins 708 millions d’euros par an en dépenses de santé dans l’UE.

Des déchets et encore des déchets !

Quelles solutions pour aller vers une mode sobre et responsable?

Comment choisir ses textiles ?

Labels, matières, étiquetage, substances à éviter, astuces : retrouvez tous nos conseils dans notre guide « Vêtements enfants » ici :

Le recyclage : une fausse bonne idée ?

Avec l’économie dite « circulaire », la mode est par exemple aux vêtements en polyester recyclé, issu du PET (polyethylene terephtalmate) des bouteilles en plastique. Si le polyester recyclé est un moindre mal par rapport à un polyester vierge issu directement du pétrole, il nécessite beaucoup d’énergie lors de la transformation de la bouteille en fibre, et reste libérateur de microplastiques lors des lavages.

Privilégier la fabrication locale, les fibres naturelles et la qualité 

La relocalisation dans les pays occidentaux d’une partie des vêtements et textiles qu’ils consomment serait une solution pour tirer vers le haut les normes sociales et environnementales du secteur, avec bien sûr une augmentation du coût des vêtements produits pour le consommateur, qui devrait idéalement être associée à une solidité accrue des matières et des produits, également éco-conçus et sans danger pour la santé. L’industrie de la mode s’est ainsi engagée en 2019 dans une « Charte pour l’action climatique ». Pour les pays devenus dépendants économiquement de la production « fast fashion », une déstabilisation brutale est à éviter.  Réorienter progressivement l’économie locale vers des savoir-faire traditionnels permettrait de faire renaître des traditions riches et diverses, en créant des emplois locaux durables, tournés vers une production de meilleure qualité. Est-ce utopique ?

En 2018, le Rwanda est devenu le premier pays d’Afrique de l’Est à interdire l’importation de vêtements de seconde main, choisissant de prioriser la relance de son industrie textile locale. Un exemple à suivre, puisque les dons de vêtements vers des pays plus pauvres sont en réalité un poison pour l’économie locale, et du fait de leur mauvaise qualité finissent souvent en décharge.

Troc, seconde main et entretien : 3 piliers pour des textiles qui durent !

La mauvaise qualité des vêtements empêche leur réemploi, leur usage prolongé et est un frein à une économie de seconde main. Que vaut un vêtement dont la fibre est si fine qu’elle est trouée dès le premier lavage ou les coutures défaites faute de fil solide et en quantité suffisante ?  

De nouveaux modes de consommation émergent, des initiatives de créateurs et créatrices voient le jour… avec une volonté de passer à une « slow fashion » de qualité et éco-conçue, et des vêtements qui durent dans le temps. « Moins et mieux » tout simplement.

Lire le N°2 : les plastiques, de fantastiques à dramatiques, sortir du tout-plastique

Lire le N°3 : numérique, santé, environnement, faire mieux et vite !

Pour aller plus loin …

Ressources Wecf :

Rapport Textiles, stop the chemical overdose, 2013, https://wecf-france.org/wp-content/uploads/2019/10/Textiles-report-2013-right-size.pdf

Infographie La mode dans tous ses états, juillet 2020; https://wecf-france.org/la-mode-dans-tous-ses-etats/

Stratégie de la société civile pour le textile, 2020, https://wecf-france.org/strategie-de-la-societe-civile-pour-le-textile/

La montagne textile, documentaire mai 2020, https://www.youtube.com/watch?v=aTuGBTaO6zk

A venir : retrouvez-nous en mai dans le magazine Biocontact spécial Textiles