Le confinement améliore la qualité de l’air extérieur
C’est l’une des informations qui a été mise en avant il y a déjà plusieurs semaines : le confinement de la ville de Wuhan et la province de Hubei a eu un effet positif sur la qualité de l’air extérieur, notamment la baisse de la pollution aux particules fines (PM2,5), liées au trafic routier, et à l’activité industrielle. Idem dans le Nord de l’Italie, dans la vallée du Pô, où on note une baisse significative des taux de dioxyde d’azote (NO2) dans l’air entre janvier et mars 2020. Pour rappel, l’OMS estime que chaque année, la pollution aux particules fines cause près de 7 millions de décès dans le monde. A contrario, si le confinement et donc la baisse d’activité humaine qu’il entraîne fait chuter les taux de certains polluants dans l’air extérieur, la pollution elle-même est un facteur aggravant de la maladie causée par le SARS-Cov-2.
Jacqueline Collard, membre du comité d’expert.e.s de Wecf France, et vice-présidente d’Atmo-Auvergne-Rhône-Alpes précise : « Le confinement nous démontre que le trafic routier est un facteur très impactant de la pollution atmosphérique, et que diminuer cette source de pollution en milieu urbain est une priorité (zones à faible émission)« .
En France, des variations des niveaux de polluants dans l’air corrélées aux baisses d’activité sont observées [le point complet par région sur le site d’Atmo-France], et également influencées par la météo :
- En Rhône-Alpes, entre le 11 et le 19 mars, la baisse du trafic routier a entraîné une baisse de 45% des concentrations en dioxyde d’azote, et de 30% des taux de particules fines (PM10) sur les axes routiers. A noter : le « fond urbain » en particules fines (hors trafic routier) reste identique.
- En Bretagne, une baisse des concentrations en particules fines, dioxyde d’azote est également observée. Cependant, la météo – hausse des températures et vent faible – favorise la formation de particules secondaires à partir d’oxydes d’azote (chauffage), et d’ammoniac (épandages agricoles).
- Au niveau national, un épisode de pollution printanier a été constaté, avec l’augmentation des niveaux de certaines particules de polluants dans l’air, du fait d’une météo favorable (vent faible, hausse des températures). Des émanations de nitrate d’ammonium et d’ammoniac liées aux épandages de pesticides sont également à noter.
La pollution de l’air ambiant, facteur aggravant de la mortalité par Covid-19
Depuis longtemps, la pollution de l’air ambiant est connue comme pouvant atteinte aux fonctions pulmonaires et cardiaques: l’impact d’infections respiratoires telles que le Covid-19 serait donc plus grave chez les citadins, exposés notamment à des polluants issus du trafic routier, ainsi que chez les personnes souffrant de pathologies pulmonaires ou cardiaques, comme l’explique Sara De Matteis, de l’Université de Cagliari (Italie), membre de la Société Respiratoire Européenne. Un constat déjà établi précédemment pour les épidémies de Sars et de Mers coronavirus en 2003 et 2012. De même, le tabagisme est sans surprise également considéré comme un facteur aggravant.
Une étude italienne publiée le 17 mars 2020, envisage pour sa part que les particules fines pourraient favoriser la propagation du Covid-19 (mais pas seulement) sur de plus longues distances que celles retenues pour les distances de sécurité préconisées pour le public. Des données qui restent à confirmer.
Demandes de suspension des épandages de pesticides
Le pic de pollution observé le 28 mars en Ile-de-France et dans d’autres régions serait lié aux épandages agricoles, et l’augmentation du chauffage au bois. La présence de nitrate d’ammonium notamment est liée aux épandages de pesticides.
Plusieurs associations, dont le Collectif Air-Santé-Climat qui regroupe des médecins, scientifiques et associations travaillant sur la qualité de l’air ont alerté les autorités (ministères, préfets) demandant une baisse drastique des épandages agricoles en ce printemps 2020. Ils expliquent que lors de l’épandage l’ammoniac (gaz NH3) réagit dans l’atmosphère avec l’oxyde d’azote (NOx) pour former des particules de nitrate d’ammonium et de sulfate d’ammonium. Les pics de pollution à ces particules sont constatés de mars à mai chaque année. Or ces particules sont à leurs yeux un vecteur de transmission du virus, pouvant voyager sur plusieurs kilomètres – une réflexion qui rejoint les constats de l’étude italienne du 17 mars. L’association « Nous voulons des coquelicots » fait écho aux mêmes préoccupations que celles du collectif « Air-Santé-Climat ». Wecf France soutient cette demande.
Sources:
[Covid-19] Les émissions de CO2 à la baisse, mais un pic de pollution aux particules observé, L’Usine nouvelle, 30 mars 2020, https://www.usinenouvelle.com/article/covid-19-les-emissions-de-co2-a-la-baisse-mais-un-pic-de-24-h-pour-les-particules.N947921
Point d’information sur les interactions entre COVID-19 et qualité de l’air, Atmo France, 27 mars 2020, https://atmo-france.org/point-dinformation-sur-les-interactions-entre-covid-19-et-qualite-de-lair-2/
Covid-19 : Faut-il arrêter les épandages de pesticides? Nous voulons des coquelicots, 27 mars 2020, https://nousvoulonsdescoquelicots.org/2020/03/27/coronavirus-faut-il-arreter-les-epandages-de-pesticides/
Air pollution likely to increase coronavirus death rate, warn experts, The Guardian, 17 mars 2020, https://www.theguardian.com/environment/2020/mar/17/air-pollution-likely-to-increase-coronavirus-death-rate-warn-experts
Tribune du collectif Air-Santé-Climat – La pollution de l’air comme vecteur du Covid-19? 24 mars 2020, http://www.asef-asso.fr/actualite/tribune-du-collectif-air-sante-climat-la-pollution-de-lair-comme-vecteur-du-covid-19/