Santé et détergents font-ils bon ménage ?
Nous avons déjà tous·tes repéré sur les produits ménagers les mentions « Ne pas avaler », « Ne pas laisser à la portée des enfants ». Les dangers pour la santé ne se limitent pourtant pas aux risques d’empoisonnement par ces produits. Les produits ménagers contiennent trop de promesses, et trop de substances toxiques !
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- Les produits ménagers sont sources de polluants dans notre air intérieur. Ils dégagent des composés organiques volatils (COV), une famille de substances chimiques se présentant souvent sous forme gazeuse. Les COV peuvent être irritants pour les voies respiratoires ou allergènes. Une substance rejetée par de nombreux produits ménagers est le formaldéhyde. Ce dernier est irritant des voies respiratoires. Une exposition élevée (surtout chez les professionnel·les) peut être cancérigène. (Source “Working women and Breast Cancer The State of Evidence”, Breast Cancer Fund, August 2015)
- Les produits ménagers contiennent aussi d’autres substances chimiques comme des conservateurs, des colorants, des émulsifiants ou des parfums. Ces différentes substances peuvent être allergènes et irritantes. C’est le cas du limonène utilisé pour les parfums ou les composés d’isothiazolinone (CMIT, MIT ou BIT) utilisés comme conservateurs. D’autres substances peuvent aussi faire partie des perturbateurs endocriniens comme c’est le cas des phtalates, utilisés comme fixateur de parfum et non-indiqués sur l’étiquette. Une restriction a été adoptée dans l’Union européenne pour limiter la présence de certains phtalates (comme le DEHP) dans les produits de consommation.
- Certains produits vendent leurs propriétés antibactériennes en affichant « Désinfectant », « Anti-microbien » ou « Tue 99% des bactéries ». Ayant connu un grand engouement avec la crise sanitaire de la Covid 19, ces produits dits « biocides » peuvent avoir des conséquences néfastes sur notre santé. Ils contribuent au phénomène d’antibiorésistance. En voulant se prémunir de parasites et « microbes » en tout genre, on élimine certains micro-organismes bons pour notre santé tout en favorisant la prolifération d’autres dangereux pour notre santé. C’est le cas des Salmonelles, Listéria ou E Coli, des micro-parasites qui ont évolué pour résister aux traitements antibactériens et qui peuvent nous rendre très malade. Malgré ce que l’on croit, et pour éviter ce phénomène d’antibiorésistance, il n’est pas nécessaire de désinfecter nos habitats ! Un simple lavage suffit.
Santé des femmes et produits ménagers
Les femmes sont surexposées à certaines substances toxiques contenues dans les produits ménagers. Dans leur travail : les femmes occupent une grande partie des métiers du « care », comme les métiers du secteur médical et du soin à la personne, secteur de l’entretien et du nettoyage, etc.. Ces professions utilisent beaucoup de produits ménagers pour répondre aux critères d’hygiène. Les équipements de protection adéquates ne sont pas toujours mis à disposition ou utilisés correctement. Au foyer également, ce sont majoritairement les femmes qui s’occupent des tâches domestiques (en 2021, en France, 62,1% des femmes en couple s’occupaient seules de tâches domestiques, contre 20,3% des hommes. Source Distribution of housework chores within the household before and during the pandemic (%), by type of household task, EIGE, 2021
Certaines femmes s’exposent donc doublement aux substances contenues dans les produits ménagers. L’exposition peut être triplée dans certaines circonstances quand les femmes occupent des fonctions non rémunérées de soin à la personne. Des études ont montré le développement d’asthme chez les femmes par l’exposition aux substances dégagées par les produits ménagers (source Pierre Lemire et autres, Domestic exposure to irritant cleaning agents and asthma in women, Environment International, Volume 144, 2020).
Environnement et produits ménagers :
Les produits ménagers ont aussi un impact important sur notre environnement. On reverse fréquemment les produits ménagers dans l’eau : liquide vaisselle, lessive, produits pour les canalisations, pour les sols.
- Certains produits ménagers contiennent des substances toxiques pour les milieux aquatiques. Comme le triclosan ou l’EDTA, un anticalcaire non biodégradable, elles sont suspectées d’être Persistants Bioaccumulables et Toxiques (PBT) et perturbateurs endocriniens .
- Le règlement sur les détergents a restreint l’usage des phosphates dans les lessives et les produits pour lave-vaisselle en raison de leur toxicité pour les milieux aquatiques. Cette restriction fait figure d’exception devant la longue liste des autres substances préoccupantes pour l’environnement présente dans les produits ménagers.
- Une autre préoccupation pour l’environnement est la présence de micro- nano-plastiques dans les produits ménagers. Les plastiques sont persistants dans l’environnement et s’accumulent dans les écosystèmes. Les microplastiques vont aussi diffuser les substances chimiques ajoutées comme les bisphénols ou les phtalates, connus pour être des perturbateurs endocriniens. A l’échelle de l’UE, une restriction est en cours pour interdire l’ajout intentionnel des microplastiques.
Lecture d’étiquettes par où commencer ?
Contrairement aux cosmétiques ou aux produits alimentaires, les produits ménagers n’affichent pas la liste exhaustive de leurs ingrédients. La législation applicable à l’étiquetage des produits ménagers est multiple.
- Un règlement sur les détergents est applicable à l’ensemble des produits ménagers mais ne doit mentionner que la présence de certaines familles de substances et dans quels pourcentages ils sont présents. 26 substances parfumées allergisantes doivent obligatoirement être étiquetées ainsi que certains conservateurs. Voir l’article de la semaine 2 Les Parfums du Printemps de la consommation responsable 2023.
- Normalement, l’ensemble des ingrédients contenus dans le produit détergent est disponible sur le site internet du distributeur. Une enquête menée par 60 millions de consommateurs a révélé que cet étiquetage virtuel était incomplet ou manquait ! ( « Entretiens de la maison Toxiques du balai ! » 60 millions de Consommateurs n°551 Septembre 2019)
- Si les produits ménagers ont des propriétés « biocides », c’est-à-dire antibactériens, virucides ou antifongiques, alors c’est le règlement sur les Biocides qui est applicable. Le produit devra indiquer quelle est la substance active et en quelle concentration.
- Si une des substances contenues dans les produits ménagers a des propriétés toxiques : allergisants, toxiques pour l’environnement, irritants, cancérigènes, c’est le règlement sur la classification, l’étiquetage et l’emballage des produits dangereux (CLP) qui est applicable. On peut lire alors le pictogramme de danger correspondant à la classe de danger ) ainsi qu’une mention d’avertissement « Tenir hors de la portée des enfants », « Ne pas mettre dans les yeux » etc….
- Malheureusement, l’étiquetage des produits ménagers est parfois lacunaire ou présenté de manière floue et imprécise. Comment savoir si les produits ménagers sont inoffensifs ou dangereux ?
Conseils et alternatives pour un ménage plus durable
- Aérer les pièces en courant d’air : permet de renouveler l’air et réduire la présence des composés organiques volatils (COV). Faites-le au moins deux fois par jour et pendant votre activité de ménage.
- Vigilance pour les femmes enceintes et les enfants de moins de 3ans : éviter de faire le ménage en leur présence pour éviter l’inhalation de substances toxiques. Bien refermer les produits ménagers et les mettre en hauteur pour éviter les accidents avec les enfants.
- Respecter les consignes de dosage : Essayer au maximum de ne pas dépasser la dose prescrite sur l’étiquette. En cas de doute, en utiliser moins.
- Moins et mieux : les produits ménagers, moins on en utilise, mieux c’est ! Quelques produits de base : vinaigre blanc, bicarbonate de soude, citron, argile et savon noir suffisent pour nettoyer toute la maison. En réduisant le nombre de produits on fait des économies et on diminue la pollution de notre air intérieur.
- Le vinaigre blanc : à utiliser dilué en tant qu’anticalcaire, anti-trace, désodorisant et antifongique.
- Le bicarbonate de soude : action nettoyante, adoucissante, désodorisante et antifongique.
- Le savon noir : à utiliser en pâte ou en liquide à diluer , un bon produit multi-usages pour toutes les surfaces.
- L’argile : assainissant et peut servir d’ingrédient dans les crèmes à récurer maison.
- Ne vous obstinez pas à vouloir à tout prix désinfecter votre habitat. Nous n’avons pas besoin de vivre dans une maison aseptisée car cela provoque un phénomène d’antibiorésistance !
- Acheter en vrac : L’achat de ces produits ménagers en vrac est aussi une bonne alternative pour limiter sa production de déchets. Soyez vigilant·es à étiqueter vos produits en vrac pour éviter les accidents domestiques.
Attention aux huiles essentielles :
Les huiles essentielles ont connu un engouement ces dernières années. Perçues comme des alternatives plus naturelles aux produits ménagers, médicaments ou cosmétiques, il faut néanmoins être vigilant·e en les employant. Les huiles essentielles sont extraites de plantes : fleurs, fruits, écorces, et sont un concentré des propriétés de ses différentes plantes. Les huiles essentielles se composent de plusieurs substances actives, présentes à différentes concentrations. La plupart présentent des propriétés allergènes et sensibilisantes et certaines ont des effets neurotoxiques. Il est préférable de s’abstenir de les employer en présence de femmes enceintes et d’enfants de moins de 3 ans.
Renseignez-vous après d’un·e pharmacien·ne avant de les utiliser. Il faut être méticuleux·se sur la manière de les conserver (bien refermer le flacon à l’abri de la lumière). Privilégier les huiles essentielles labellisées bio car elles contiennent moins de résidus de pesticides.
- Privilégier les produits comportant un label : vous pouvez repérer un de ces labels sur les produits ménagers (image ci-dessous) . Ces labels signifient que le produit répond à un cahier des charges strict, vérifié par un organisme indépendant. Seuls ces labels sont une garantie d’un produit plus écologique.
Beaucoup de produits sont étiquetés avec des mentions comme « Bon pour la planète », « Bon pour l’océan », « 100% naturel ». Il s’agit en réalité d’allégations publicitaires, qui ne garantissent pas que le produit soit bon pour l’environnement. On reconnaît ici le « Greenwashing » ou « écoblanchiment ». Des mesures règlementaires sont en cours d’adoption en France et dans l’UE pour mieux règlementer ces dérives.
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