« Le RAC classe le BPA R 1B ». Cela vous laisse perplexe? D’accord, en langage courant et compréhensible: le Comité d’Evaluation des Risques (RAC) de l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) soutient la classification du bisphénol A comme Reprotoxique 1B , soit une catégorie au-dessus de sa classification actuelle dans le groupe 2. Une implication qui a du sens en termes de réglementation, lorsqu’elle aura été validée par la Commission européenne.
Quelques mots sur le « RAC » et l’ « ECHA »
Le RAC est un comité chargé de rendre des avis à l’ECHA sur les substances dangereuses pour la santé et l’environnement dans le cadre des réglementations REACH (Enregistrement, Evaluation, Autorisation des Substances chimiques) et CLP (Classification, Etiquetage et Emballage): les membres du RAC sont nommés pour 3 ans par l’ECHA sur proposition des Etats membres. Pour ce qui est de décider de la classification finale de la substance, c’est la Commission européenne qui a ensuite le dernier mot. Des ONG sont observateurs lors de réunions du RAC.
Classer le BPA toxique pour la reproduction 1B: une proposition de la France
C’est à la France que revient le mérite d’avoir proposé d’harmoniser par le haut la classification du BPA au niveau européen pour le classer (note 1) comme « présumé toxique pour la reproduction » (1B) putôt que « suspecté d’être toxique pour la reproduction » (note 2). On peut donc la féliciter pour cette proposition, issue notamment du travail de l’ANSES et de ses rapports sur le bisphénol A. D’ailleurs la France propose une restriction d’usage du BPA dans les tickets de caisse, par l’intermédiaire du règlement REACH.
BPA, de reprotoxique 2 à 1B: quelles conséquences?
Un classement du bisphénol A dans la catégorie reprotoxique 1B a des conséquences au niveau des expositions professionnelles: recherche de substitution obligatoire pour l’employeur, justification par l’employeur des démarches entreprises pour substituer le composé qui seront inscrites dans un document unique d’évaluation des risques (note 3).
Le BPA est déjà classé en Europe comme suspecté d’avoir des effets néfastes sur la fertilité, pouvant être irritant respiratoire ou déclencher une réaction allergique cutanée, et comme substance portant gravement atteinte à la vue. Le RAC s’est prononcé sur ses effets sur les fonctions sexuelles et la fertilité, soit ceux mis en avant par la France dans son dossier. Le RAC a conclu à des effets néfastes sur la capacité reproductive suite à une exposition orale au BPA menée dans le cadre d’une étude transgénérationnelle sur des souris et des rats. Des atteintes à la capacité reproductive féminine ont également été observées dans d’autres études, tout comme des effets toxiques sur des organes reproducteurs.
« Alors que des mesures pour limiter la migration du bisphénol A dans les jouets ont récemment été annoncées en Europe, cette nouvelle classification renforcerait la cohérence des mesures sur le BPA… reste maintenant à étendre cette cohérence à d’autres substances tout aussi présentes dans nos vies et tout aussi problématiques en termes de : c’est bien pour cette raison que des stratégies nationale et européenne doivent être adoptées dans les meilleurs délais. Comme elle vient de le prouver, la France peut être force de proposition et entraîner ses partenaires européens: c’est ce que nous souhaitons« , déclare Elisabeth Ruffinengo, responsable Plaidoyer pour WECF.
Notes:
(Note 1) la classification considère les propriétés intrinsèques de danger de la substance et ne prend pas en compte les niveaux d’exposition humaine. Cette précision est importante, alors que des lobbies tentent de faire disparaître la notion de « danger » des réglementations, des textes d’application et de mise en œuvre des lois pour mieux mettre en avant le « risque »… qui peut être « géré »…
(Notes 2 et 3) voir notamment le site de l’ANSES pour des explications sur la classification du règlement CLP et ses conséquences
