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Le bisphénol S, substitut du bisphénol A est lui aussi un perturbateur endocrinien

Le bisphénol S, substitut du bisphénol A est lui aussi un perturbateur endocrinien La nouvelle est sans surprise pour qui travaille sur la question des perturbateurs endocriniens: des équipes de chercheurs de Toulouse ont publié ce 17 juillet dans la revue Environmental Health Perspectives une étude montrant que le bisphénol S (BPS), "solution" de substitution du bisphénol A (BPA), qui appartient à la même famille de composés, a des propriétés encore plus problématiques. C'est une très mauvaise alternative!

Le bisphénol S: plus persistant dans l’organisme vivant que le BPA

Les équipes de recherche de l’Ecole vétérinaire nationale de Toulouse et du laboratoire Toxalim (Inra/Toulouse universités), en collaboration avec les universités de Montréal et de Londres, montrent que le bisphénol S persiste plus longtemps dans l’organisme (d’un animal) et à des doses beaucoup plus élevées que le BPA: ils estiment que la substitution amène à multiplier par environ 250 les concentrations dans le sang de ce perturbateur endocrinien.

L’étude en bref

  • L’étude a été menée sur des porcelets, auxquels les chercheurs ont administré du bisphénol S et du bisphénol A par voie orale et intraveineuse à des porcelets, une voie connue pour permettre d’évaluer la toxicité orale d’un composé.
  • Des échantillons de plasma et d’urine ont été examinés après administration des substances aux porcelets.
  • La quasi-totalité du BPS administré par voie orale a été absorbé et transporté vers le foie: sa biodisponibilité y reste de 57%, beaucoup plus que le BPA (0,5%). Par ailleurs, le BPS est également éliminé plus lentement que le BPA, soit environ 3,5 fois plus lentement). Les deux facteurs entraînent une concentration de BPS dans le sang 250 fois plus élevée que le bisphénol A, pour la même dose administrée.
  • Les chercheurs concluent que remplacer le BPA par le BPS amène à augmenter l’exposition à une « substance hormonellement active ».

Stop aux « substitutions regrettables », oui à des alternatives sans danger pour la santé et l’environnement

  • L’exemple du BPS illustre une pratique courante: la substitution d’un composé problématique – ici le BPA – par une molécule ayant des propriétés similaires pour permettre un usage dans le même type d’application.
  • Or, souvent, un composé avec les mêmes propriétés aura aussi des caractéristiques similaires en termes de toxicité. C’est le cas pour la « famille » des bisphénols, comme l’ont montré plusieurs publications, dont des rapports de l’Anses publiés entre 2011 et 2015, et qui s’inquiétaient des effets des substituts du BPA appartenant à la famille des bisphénols. En mars 2018, l’ONG britannique CHEMTrust a publié sur le sujet un rapport « From BPA to BPZ: toxic soup », que Wecf a traduit en français, et qui mettait en évidence ces éléments.
  • Il devient urgent d’évaluer et réglementer des familles de substances, pour éviter de perdre des décennies – ou plus – dans la réduction de l’exposition à des substances préoccupantes que sont les perturbateurs endocriniens.
  • La substitution devrait se concevoir au sens large, allant au-delà des seules alternatives chimiques, et permettant d’élargir le champ des travaux pour mettre au point des alternatives.
  • Il s’agit maintenant de mettre en oeuvre une prévention de l’exposition à cette substance, dont les effets sont connus.

Le principe de précaution pour éviter l’usage de composés dont ont ignore les effets

Plus largement, une mise en oeuvre du principe de précaution, avec des moratoires dans l’attente de prouver l’innocuité de composés, serait la meilleure solution pour éviter l’exposition de millions de nouvelles personnes chaque jour. « L’absence de preuve d’effets néfastes ne signifie pas la preuve de l’absence d’effets néfastes », comme l’a souvent expliqué David Gee, expert de l’Agence européenne de l’environnement.

Sources:

article publié le 17 juillet dans Environmental Health Perspectives

Article publié sur le site de l’Ecole nationale vétérinaire de Toulouse