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Bisphénol A (2ème partie) : lobbies industriels à la manoeuvre, à Bruxelles rien de nouveau

Bisphénol A (2ème partie) : lobbies industriels à la manoeuvre, à Bruxelles rien de nouveau

« Tous les principes sont égaux mais certains seraient-ils plus égaux que d’autres? »

Ce que George Orwell écrivait des êtres humains s’appliquerait-il aux principes de droit? Principe de précaution, de protection de la santé vs principe de libre circulation: le débat resurgit régulièrement. La nouvelle Commission européenne semble accorder singulièrement plus de poids à la libre circulation des marchandises qu’à la protection de la santé, estimant par la voix du Commissaire à la santé Vytenis Andriukaitis que les Etats peuvent adopter des règles sur les contenants alimentaires mais doivent se plier aux règles européennes, « en particulier le principe de libre circulation des marchandises ». Pourquoi celui-là plus qu’un autre?

Sacré principe de libre-circulation?


Que le principe de libre circulation soit appliqué nul ne peut en douter : dans l’Union européenne et dans le monde, la circulation des marchandises s’apparente parfois à une schizophrénie avec des produits circulant bruts, semi-transformés, etc. jusqu’à une destination finale d’achat. La toute-puissante OMC (Organisation Mondiale du Commerce) veille au grain. Le principe de proportionnalité, autre grand principe européen est également mis en avant par la Commission; Il permet de s’assurer que la mesure prise est proportionnelle au danger – échelle de la mesure nationale ou européenne pour une meilleure efficacité? type de mesure (information? interdiction? étiquetage?), etc. A noter que la Commission n’a pas parlé du « principe de précaution », l’aurait-elle oublié dans sa liste?

« Sans BPA je ne m’en sors pas » tente l’industrie agro-alimentaire


A l’entendre, « Elle panique » : elle – l’industrie agro-alimentaire – sans le BPA elle serait démunie. Le Royaume-Uni s’en fait le porte-voix, déclarant que la décision française fait peser une incertitude juridique sur le secteur et remet en cause le rôle de l’EFSA. Que penser pourtant, quand un industriel représentant Plastics Europe déclare au détour d’une conversation informelle que « Le bisphénol A c’était fait 2 ans avant la loi » (laquelle? biberons? contenants alimentaires? autres?) ou encore que la loi permet d’ « écouler les stocks de boîtes de conserve produites avant fin 2014« . D’ailleurs, un rapport sur les substituts du BPA publié pour le Ministère de l’Ecologie français en 2014 rapporte que « Les représentants professionnels estiment aussi que malgré les incertitudes encore existantes sur ces substituts, les dispositions de la loi relative au bisphénol A
pourront être respectées au 1er janvier 2015. Selon les représentants des fabricants de matières plastiques, la production industrielle des matériaux de substitution au polycarbonate est en effet satisfaisante
mais les utilisateurs pourraient ne pas trouver les mêmes niveaux de performance. »

On le voit bien, le dossier du bisphénol A est un symbole car il pourrait ouvrir la voie pour traiter de manière analogue l’ensemble de la catégorie des perturbateurs endocriniens. Le sceptre d’effets sur la santé qu’il est soupçonné ou qu’il est connu pour avoir est très large, d’autre part, il est utilisé dans de nombreuses applications dont certaines destinées aux publics les plus vulnérables – femmes enceintes et très jeunes enfants. C’est l’une des seules substances qui a fait l’objet d’autant de recherches et sur laquelle on dispose d’une abondante littérature scientifique: depuis plusieurs années, de nombreux scientifiques à l’image d’Ana Soto qui a étudié en détail la substance, préconisent des mesures. C’est donc bien la science et le bon sens qui doivent guider les décisions et non pas le souci de faire circuler des biens, quelle que soit leur utilité.

A lire également:

2 rapports parus en novembre dernier remis au Ministère de l’Ecologie en France: