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Projets de solidarité internationale

Projet REGAIN : 3 ans d’engagements pour la justice climatique et de genre

Alors que la phase I du projet « Renforcer l’Egalité de Genre pour l’Ambition Internationale et Nationale (REGAIN) des politiques climat » s’est terminée en janvier 2025, il est temps de revenir sur les grandes réussites de ce projet multi-pays, qui a su allier justice climatique et égalité de genre.

Initié en février 2022, le projet REGAIN, co-financé par l’Agence Française de Développement (AFD), la Fondation RAJA-Danièle Marcovici et la Ville de Paris, a été mis en œuvre sur le terrain par nos partenaires, structures féministes locales, Cameroon Gender and Environment Watch (CAMGEW) au Cameroun, la Coalition des Femmes Leaders pour l’Environnement et le Développement Durable (CFLEDD) en République démocratique du Congo (RDC) et Enda Colombia en Colombie. Avec pour objectif principal de contribuer à des politiques climatiques plus ambitieuses et intégrant le genre, REGAIN a permis la réplication et le développement d’initiatives locales, résilientes et inclusives dans ces 3 pays. Les actions mises en œuvre ont ensuite nourri le plaidoyer climatique pour défendre l’intégration pleine et effective du genre dans des politiques climatiques à l’échelle nationale et internationale.

Alors que la phase I du projet s’est achevée en janvier 2025, il est temps de revenir sur les activités phares de la 3e année de mise en œuvre.

Appui à l’insertion de 3 coopératives apicoles et agroforestières féminines dans les filières miel et agroforesterie au Cameroun

Au Cameroun, dès le début de l’année 2024, CAMGEW a focalisé ses efforts sur la création et légalisation de 3 coopératives apicoles et agroforestières, dirigées et composées majoritairement par des femmes. Les coopératives ainsi créées rassemblent plus de 850 personnes aux compétences complémentaires, formées par CAMGEW pendant les années 1 et 2 du projet. Afin de renforcer l’intégration des coopératives sur le marché local, celles-ci ont été formées aux techniques de conditionnement et de stockage des produits destinés à la vente. Près de 700 membres des coopératives ont pu bénéficier de ces formations, dont une majorité de femmes et de jeunes.

Légalisation des coopératives, mai 2024
Formation sur le conditionnement des produits destinés à la vente, juin 2024

La création des coopératives a été suivie par la mise en place d’une plateforme de commercialisation pour la vente de leurs produits, renforçant ainsi de manière tangible l’autonomie économique des bénéficiaires. Cette plateforme est devenue active à partir de décembre 2024 et représente également un lieu d’échanges et de partage de connaissances entre membres des coopératives et autre parties prenantes (autorités locales, clientèle, etc.) Les 31 dirigeant·es des coopératives, dont 26 femmes, ont également reçu une formation à la gouvernance et au management pour améliorer leur gestion des coopératives. En fin d’année 2024, plusieurs visites d’échanges de pratiques ont eu lieu dans les centres urbains à proximité, avec des acteurs locaux expérimentés, afin que les coopératives se fassent connaître et pour les inspirer à se développer.

Visite d’échanges de pratiques avec les 3 coopératives, août 2024

Tout au long de l’année, CAMGEW a aussi poursuivi ses actions de sensibilisation à la conservation de la biodiversité et la prévention des feux de brousse, à travers des émissions radio diffusées largement. Les derniers mois du projet ont été consacrés à la production d’un documentaire sur les réussites du projet REGAIN, disponible ici, mettant en lumière les témoignages des bénéficiaires du projet.

Renforcement d’un réseau de femmes leaders d’associations de recyclage en Colombie et tournant législatif majeur

Enda Colombia a poursuivi l’accompagnement de 5 associations de recyclage vers la formalisation avec la finalisation en 2024 du géoréférencement des itinéraires de collecte de chacun·e des membres des associations, une étape fondamentale de ce processus.

Avec la création en début d’année 2024 du réseau “Ecorecicreadoras”, composé de 25 femmes leaders d’associations de recyclage, les récupératrices ont affirmé leur volonté de devenir des actrices essentielles de l’économie circulaire et des politiques publiques de gestion des déchets. Elles ont ainsi mené l’organisation d’une mobilisation exceptionnelle à Suba, pour le 1er mars, Journée international des récupérateur·rices, qui a contribué à une victoire majeure : la réactivaton d’un groupe de travail spécifique à la mairie de Suba. Ce groupe devient ainsi un espace de dialogue collectif et privilégié avec les autorités locales et autres parties prenantes, pour répondre aux problématiques rencontrées par les récupérateur·rices.

Les récupérateur·rices d’Eco Millennium lors de la mobilisation du 1er mars 2024 à Bogota

Pour renforcer les échanges d’expériences et de savoirs entre associations de recyclage, une visite a été organisée,  en septembre 2024,  entre les récupératrices du réseau Ecorecicreadoras et des associations locales de recyclage à Medellin. Ces rencontres, inédites pour la majorité des femmes concernées, ont été l’occasion d’en apprendre davantage sur les pratiques d’autres groupes, mais aussi de mieux saisir leur place dans l’écosystème national d’associations de recyclage.

Enda Colombia a également soutenu la participation de 5 récupératrices leaders du réseau Ecorecicreadoras à la COP16 sur la biodiversité à Cali en octobre 2024. Cette expérience particulièrement enrichissante a permis aux récupérateur·rices d’interagir et d’échanger avec des représentant·es de gouvernements et autres parties prenantes stratégiques, renforçant directement leur estime de soi et leurs capacités à se présenter et communiquer dans un contexte officiel. 

Visite d’un centre de collecte à Medellin, septembre 2024

Depuis plusieurs années, les associations de recyclage luttent également pour une modification du cadre législatif les concernant, pour améliorer le processus de formalisation et stabiliser leur situation. En octobre 2024, un sit-in de plusieurs jours, auquel ont participé toutes les associations accompagnées dans le cadre du projet REGAIN et rassemblant près de 300 récupérateur·rices au total, a mené à la modification du décret 596/2016, qui encadre le processus de formalisation des récupératrices. Ce nouveau décret 1381/2024, promulgué en novembre, renforce davantage la reconnaissance du rôle des récupératrice dans l’économie circulaire, mais nécessitera une remise au niveau pour les associations concernées.

Un des objectifs du projet en Colombie était également de sensibiliser la population au rôle des récupérateur·rices et à l’importance du tri et du recyclage. C’est dans ce but que des actions de sensibilisation ont été menés auprès des établissements scolaires, entreprises et résidences, touchant environ 2000 personnes en 2024. Un court-métrage, intitulé « Histoires vraies racontées avec des déchets« , produit par Enda Colombia et co-réalisé avec les récupératrices, a également vu le jour en fin d’année 2024.

Atelier de sensibilisation au tri et au recyclage auprès de l’école Ciudad Hunza à Bogota, avril 2024

Enfin, début décembre 2024, WECF s’est rendue en Colombie pour une deuxième visite terrain afin d’échanger sur les derniers avancements et les perspective du projet.

Obtention de titres de propriété coutumiers pour 50 femmes supplémentaires et plaidoyer national pour l’accès au droit foncier en RDC

Au cours de l’année 2024, la CFLEDD a réalisé 2 campagnes de cartographie participatives dans les provinces du Mai-Ndombe et de l’Equateur, pour identifier et délimiter les terres. Pour chaque cartographie, un groupe de personnes a été formé en tant que cartographes locaux·les, sur la base de leur connaissance du terrain et de leur maitrise des outils cartographiques numériques, pour la production de cartes géoréférencées. Après validation des cartes par le voisinage et autorités locales,  50 femmes ont pu obtenir leur acte de reconnaissance – équivalent d’un titre de propriété coutumier. Ces dernières ont ainsi pu sécuriser leurs droits fonciers et devenir pleinement propriétaire de leurs terres. Ces titres ne sont pas seulement des instruments juridiques, mais aussi des leviers d’autonomisation économique et de renforcement du pouvoir des femmes dans leurs communautés.

Remise des actes de reconnaissance dans la province Equateur, juin 2024

Dans un contexte où l’accès au droit foncier est historiquement marqué par des dynamiques patriarcales fortes, notamment en milieu rural, l’implication des hommes dans les processus de cartographie participative et d’attribution des titres fonciers est à une double nécessité sociale et stratégique. Les hommes — qu’ils soient chefs coutumiers ou représentants des familles — exercent encore une influence prépondérante sur la gestion et la transmission des terres. Ignorer cette réalité reviendrait à fragiliser le processus et à exposer les bénéficiaires femmes à des contestations ou à une absence de reconnaissance effective au sein de leur propre communauté. La mixité des groupes permet d’assurer l’acceptabilité sociale des titres attribués aux femmes, de favoriser un dialogue équilibré entre femmes et hommes et de sensibiliser les hommes aux droits fonciers des femmes. C’est pourquoi, les activités de la CFLEDD ont également permis la délivrance à 44 hommes de leur acte de reconnaissance. Au total, ce sont donc 100 femmes et 44 hommes qui ont bénéficié de la cartographie participative. En associant les hommes, la CFLEDD renforce son ancrage local et ouvre la voie à une gouvernance foncière plus inclusive et durable.

Afin de communiquer sur les réussites du projet REGAIN, la CFLEDD a réalisé et produit un documentaire incluant les témoignages de l’équipe de la CFLEDD mais aussi des bénéficiaires du projet.

Remise des actes de reconnaissance ans la province de Maï Ndombé, mai 2024

Les campagnes électorales et élections présidentielles et législatives de décembre 2023 ont perturbé les réunions de plaidoyer prévues en 2024 par la CFLEDD à l’échelle nationale et provinciale, notamment concernant la réforme foncière et le suivi des édits provinciaux. Toutefois,  l’ONG a pu prendre part à la rédaction d’une note de contribution, en partenariat avec d’autres organisations de la société civile. Cette note avait pour objectif d’informer les député·es récemment élu·es sur le travail de la société civile mais également de construire des synergies potentielles afin d’assurer leur engagement sur cette thématique.

En janvier 2025, WECF s’est rendue en RDC pour une deuxième visite terrain afin d’accompagner l’équipe de la CFLEDD dans les procédures administratives et financières nécessaires à la clôture de la phase I de REGAIN. Cela a également été l’occasion de faire le bilan des réussites des 3 ans de projet et d’envisager ensemble la suite.

Accompagnement stratégique des organisations partenaires par WECF

Tout au long de l’année, WECF France a poursuivi l’accompagnement individualisé et renforcement des 3 organisations partenaires du projet, adapté aux besoins et priorités propres à chaque organisation, notamment sur la recherche de financements et le suivi administratif et financier.

Le 31 mai, WECF a organisé un webinaire exclusif, dans le cadre des semaines de l’Amérique latine et des Caraïbes, mettant le rôle des récupératrices de déchets dans la lutte contre le changement climatique à Bogota. Cela a été l’occasion, pour une vingtaine de participant·es, d’écouter les interventions de Maria Victoria Bojaca Penagos, directrice d’Enda Colombia et de Graciela Quintero Medina, représentante de l’association de recyclage Colectivo Loma Verde.

Invitation pour le webinaire du 31 mai organisé par WECF France

Au niveau du réseau des lauréates du prix Solutions Genre et Climat, les sessions mensuelles de partages et d’échanges entre elles ont continué toute l’année, culminant avec un atelier sur le développement d’une stratégie de plaidoyer à l’ère du numérique organisé par WECF lors de la COP29 à Bakou en novembre 2024, à laquelle les représentantes de CAMGEW et de la CFLEDD ont pu participer. Lors de la COP, 7 lauréates ont également présenté leurs initiatives lors d’évènements parallèles.

Naiyan Kiplagat, lauréate 2023, présente son project Paran Women Group à la COP29
Pluieurs membres du réseau des lauréates sur scène lors d’un side event à la COP29, novembre 2024

En fin d’année 2024, WECF a également lancé l’évaluation finale du projet, réalisée par une équipe externe et terminée en février 2025. Elle a permis de souligner l’originalité et la pertinence du projet REGAIN, au croisement du genre et du climat. Elle a clairement établi que les trois OSC partenaires ont pu amplifier leurs activités et actions, sur la base des besoins exprimés par les communautés cibles. Le rapport de l’évaluation finale a été présenté lors d’un atelier de restitution le 7 mars 2025, en présence des partenaires du projet et de l’AFD.

Bilan et perspectives du projet REGAIN

REGAIN a posé les fondations d’une transformation durable et d’une reconnaissance croissante des initiatives de terrain, portées par des organisations locales et féministes :

  • Création de 3 coopératives apicoles et agroforestières au Cameroun, rassemblant plus de 850 personnes aux compétences complémentaires
  • Formation et accompagnement vers la formalisation de 300 récupérateur·rices de déchets issu·es de 5 associations de recyclage en Colombie
  • Attribution à 100 femmes de leurs actes de reconnaissances, les rendant pleinement propriétaires de leurs terres en RDC
  • Sensibilisation de plus de 15 000 personnes au tri des déchets et à la prévention des feux de brousse au travers d’ateliers
  • Diffusion d’émissions radios et TV mettant en avant les activités des OSC partenaires, touchant au moins 1,5 millions de personnes dans les 3 pays

Grâce à l’accompagnement de WECF, les OSC partenaires ont pu renforcer leurs capacités techniques et stratégiques, élargir leurs réseaux, et contribuer de manière plus structurée aux débats climatiques internationaux (participation à divers sommets internationaux), tout en consolidant leur impact au niveau local.

Des publications, des ateliers de capitalisation, et des campagnes de communication ont permis de toucher près de 20 millions de personnes à travers le monde, et de mettre en lumière les initiatives résilientes et inclusives menées par les lauréates.La richesse des enseignements et la puissance des dynamiques enclenchées préparent déjà le terrain pour une deuxième phase, qui permettra la consolidation de ces initiatives.

Car une chose est sûre : face à la crise climatique, les solutions sont déjà là, portées par les communautés locales et par les femmes, pour un monde plus juste et plus résilient.