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Effets des nanomatériaux sur la santé reproductive des femmes : trop peu de données

Effets des nanomatériaux sur la santé reproductive des femmes : trop peu de données Un article publié le 6 avril par l'Observatoire des nanomatériaux de l'Union européenne (EUON) souligne que les données sur l'impact des nanomatériaux sur la fertilité féminine sont lacunaires. Par ailleurs, elles le sont également sur la santé reproductive en général. Alors que les nanomatériaux sont largement présents dans les produits du quotidien, et plus largement dans notre environnement quotidien, cette question mérite pourtant la plus grande attention.

L’étude en chiffres

L’étude est motivée par le fait que les nanomatériaux pourraient avoir des effets toxiques pour la reproduction et le développement, en raison de leur capacité à traverser les membranes cellulaires et les barrières biologiques du corps humain.

  • 111 publications portant sur 19 types de nanomatériaux manufacturés ont été examinées,
  • Les 19 nanomatériaux sont les suivants : dioxyde de titane, argent, oxyde de zinc, dioxyde de silicone, nanotubes de carbone et graphène, noir de carbone, autres nanomatériaux (aluminium, cadmium, cérium, cobalt, cuivre, or, fer, plomb, manganèse, nickel, platine, polystyrène, sélénium),
  • 48% des études portent sur le nano-dioxyde de titane et le nano-argent, tandis que 34% des études portent sur le nano-oxyde de zinc, le nano-oxyde de silice et les nanomatériaux à base de carbone. Les 18% des études restantes portaient sur 13 nanomatériaux.

Quels effets sur la santé?

  • Les données suggèrent que le nanoparticules peuvent traverser le placenta et atteindre le foetus, suite à une exposition maternelle par voie orale. Plusieurs études pourraient ne pas avoir permis de localiser les nanoparticules, du fait de limites de détection trop élevées. Les données existantes suggèrent que les nanoparticules peuvent atteindre des organes clés pour la reproduction et le développement foetal (testicules, ovaires notamment), et que le potentiel de transfert dépend du type de nanomatériaux et de la taille des particules [la définition des nanomatériaux étant à l’heure actuelle encore floue].
  • Concernant les effets sur la fertilité, les recherches concernent les effets sur la fertilité masculine et les effets sur la fertilité féminine sont très peu étudiés. Les études, menées sur des rats adultes ou en période de puberté ou pré-puberté, montrent les effets suivants: effets néfastes sur la qualité du sperme, baisse de la quantité de sperme produite quotidiennement, ou encore réduction du poids des testicules. Les résultats montrent que c’est la substance chimique elle-même plutôt que la forme nanoparticulaire qui est en cause.
  • Concernant les effets sur le développement, certaines études menées chez le rat ou la souris pointent les effets de divers types de nanoparticules et nanomatériaux tels que : effets sur le placenta et le système cardiovasculaire de la descendance (dioxyde de titane nano inhalé ), neurotoxicité pour le développement (nano-argent par voie orale), effets sur le placenta, la croissance fœtale et la viabilité de la descendance (nano-oxyde de zinc par voie orale), etc. Des études constatent chez la descendance de femelles en gestation ayant inhalé du dioxyde de titane nanoparticulaire des effets néfastes sur les fonctions et les tissus cardiaques, tandis que le cerveau serait sensible à une exposition au nano-argent, au noir de carbone et aux nanoparticules d’aluminium en cours de grossesse.

Conclusions générales de l’étude

  • Le rapport souligne que parmi les études prises en compte, toutes ne sont pas réalisées selon les lignes directrices de l’OCDE (mais ce type d’études ne serait pas le seul qui permet de déceler des effets, loin de là, et de nombreux chercheurs appellent à une prise en compte plus large de la littérature scientifique, tant qu’elle est de qualité, y compris hors des normes préconisées par l’OCDE).
  • En second lieu, les études prises en compte diffèrent largement en termes de protocoles, types d’animaux utilisés [dans ce cadre l’expérimentation animale reste autorisée], type de nanomatériaux pris en compte, etc. Une forte incertitude existe donc quant aux conclusions.
  • Troisième point: les études portant sur l’exposition par inhalation sont peu nombreuses, alors qu’elle pourrait être une voie d’exposition critique de toxicité des nanomatériaux par rapport à la voie d’exposition orale. L’inhalation est la principale voie d’exposition des professionnels, et elle est une voie directe d’exposition pour les nanoparticules dispersées.
  • Quatrième point, et non des moindres: les études sur la fertilité féminine sont quasiment inexistantes.

Les recommandations pour l’avenir

Les auteur.e.s demandent notamment:

  • De renforcer les recherches sur la voie d’exposition aérienne/ l’inhalation;
  • Davantage d’études sur les effets sur la fertilité féminine et la reproduction dans son ensemble;
  • Sélectionner des périodes d’exposition pertinentes, puisque le déplacement des nanoparticules varie probablement considérablement au cours de la gestation;
  • Dans les études portant sur la toxicité développementale, inclure les paramètres des fonctions post-natales davantage (fertilité de la descendance, fonctions neurologiques, immunitaires, cardiovasculaires et histologiques (structure des tissus)).

En savoir plus :

A critical review of studies on the reproductive and developmental toxicity of nanomaterials, ECHA/EUON, DHI A/S & the Danish National Research Center for the Working Environment, April 2020, https://euon.echa.europa.eu/documents/23168237/24095696/critical_review_of_studies_on_reproductive_and_developmental_toxicity_of_nanomaterials_en.pdf/c83f78ef-7136-ef4b-268c-c5d9b7bf1fea