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Lubrizol: quelles informations 3 semaines après l’accident?

Lubrizol: quelles informations 3 semaines après l’accident? Quelles sont et seront les conséquences de l'accident survenu sur le site de l'usine chimique de Lubrizol à Rouen le 26 septembre dernier? Les incertitudes sont nombreuses, tant au niveau des quantités et de la nature exacte des produits chimiques stockés dans les entrepôts où a eu lieu l'incendie, que des conséquences directes et indirectes sur la santé des riverains, et des personnes directement ou indirectement exposées. Cet accident est survenu sur l'un des plus des 706 sites Seveso "seuil haut" que compte la France. Sur l'ensemble du territoire, 1300 sites Seveso sont répertoriés.

Flou sur la nature des produits et les quantités qui ont brûlé

Sur le site même de l’Usine Lubrizol, plus de 5000 tonnes de produits chimiques auraient brûlé lors de l’incendie. Le site voisin de Normandie Logistique, également touché par l’incendie contenait quant à lui près de 9000 tonnes de produits . Le panache de fumée noire, présent sur la ville de Rouen toute la journée du jeudi, s’est propagé largement autour du site, avant d’atteindre les Hauts de France, Lille, puis la Belgique. Une liste des produits présents dans l’entrepôt de Lubrizol avait été publiée le 1er octobre, mais sous une forme très obscure pour les populations. Le site de Normandie Logistique lui, « n’a pas été en mesure de produire l’inventaire des produits ayant effectivement brûlé dans l’incendie », mais a publié le 3 octobre un inventaire des 9000 tonnes des produits L’inventaire produit par Normandie Logistique récapitule la totalité des stocks présents dans les 3 bâtiments touchés par l’incendie.

La préfecture de Seine-Maritime publie régulièrement une mise à jour des informations sur son site, au fur et à mesure des résultats. A ce jour, Cependant, comme l’illustre un reportage d’Envoyé Spécial, les riverains n’obtiennent que des réponses très floues de la part des autorités. Les résultats se sont voulus rassurants, tant sur les polluants présents dans les gaz respirés autour du site, que sur les suies qui ont contaminé les environs, sans convaincre pour autant. La présence d’amiante dans le fibrociment des toitures, qui a été dispersé par l’explosion, a bien été confirmée. Concernant les dioxines, la préfecture notait le 3 octobre que  » Il est probable que l’incendie ait conduit à l’émission de dioxines comme beaucoup d’incendies de bâtiments » (sic). Enfin, des nanomatériaux ont-ils brûlé pendant l’incendie, et avec quels risques? La question a été posée aux autorités, sans réponse à ce jour.

Contamination des sols et aliments

Si aucune restriction concernant la qualité de l’eau de boisson n’a été prise, les productions végétales et animales telles lait, œufs, miel, ont été placées sous consigne dans les communes où des suies ont été observées (Seine-Maritime, Oise, Nord, Somme et Aisne). Depuis le 26 septembre, l’Anses a publié 3 avis concernant :

  • Produits alimentaires: L’Anses a confirmé la nécessité de rechercher dioxines, furanes, PCB et HAP, ainsi que métaux dans les produits agricoles et denrées alimentaires, et proposé d’élargir à d’autres substances. Elle a demandé des prélèvements de sols, et une surveillance des conséquences de l’accident.
  • Lait: 130 prélèvements de lait faits dans les 3 à 11 jours après l’incendie ont été réalisés. L’Anses n’a pas relevé de dépassement des limites réglementaires, mais relevé des éléments d’incertitude sur la contamination des laits par les retombées de l’incendie. Le 14 octobre, le ministère de l’agriculture a levé les restrictions sur le lait, les produits laitiers et l’accès aux pâturages des animaux d’élevage.
  • Eau: Après l’incendie, un suivi renforcé de la qualité des Eaux destinées à la consommation humaine (dites « EDCH ») a été mis en place par l’Agence Régionale de Santé (ARS) de Normandie. Il a ciblé en priorité les réservoirs d’eau potable aériens situés sous le panache et à proximité de la source de pollution, puis les captages d’eaux souterraines. L’Anses recommande un suivi particulier jusqu’à la fin 2019, comprenant la recherche de composés organiques et de métaux recherchés dans les aliments tels que les dioxines et PCB, hydrocarbures ou HAP.

De nombreuses plaintes déposées

Plusieurs plaintes ont été déposées suite à l’incendie:

La responsabilité de Lubrizol et des pouvoirs publics pointée du doigt

Le 4 octobre dernier, la ministre de transition écologique et solidaire Elisabeth Borne s’est entretenue avec le PDG de Lubrizol Corp : elle a exigé un accompagnement de l’entreprise qui soit « exemplaire », mentionnant le « principe pollueur-payeur ».

Dans une tribune publiée le 17 octobre, 11 associations et syndicats, parmi lesquels l’association Henri Pézerat, ATTAC France ou encore plusieurs syndicats, pointent la responsabilité de l’industriel et de l’Etat, exigeant « Plus jamais ça », et énoncent une liste de mesures concrètes à prendre de manière urgente:

  • Publication in extenso de la liste des produits brûlés, ce qui passe par la levée des secrets de fabrication ;
  • Liste des molécules (PCB, dioxine etc.) qui ont potentiellement pollué les sols;
  • Diffusion des chiffres sur les maladies professionnelles des salariés actuels ou anciens de Lubrizol ;
  • Prise en charge médicale des populations et suivi à long terme, plus particulièrement pour les femmes enceintes et les enfants ;
  • Estimation dans les meilleurs délais du préjudice et mise en place d’une aide d’urgence pour les victimes;
  • Protection des salariés de Lubrizol ou d’autres entreprises par les autorités s’ils souhaitent témoigner de leurs conditions de travail et de sécurité, ce qui implique un renforcement de la loi sur les lanceurs d’alerte, etc.