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Covid-19 – N°7 : Relance du tout-jetable et des déchets

Covid-19 – N°7 : Relance du tout-jetable et des déchets La crise du Covid-19 peut en cacher plusieurs autres : parmi elles, la crise préexistante des déchets, du plastique et du tout-jetable. Car si elle semble aujourd'hui marquer le pas, la crise Covid a entraîné dans son sillage de nombreuses modifications des comportements, habitudes de consommation, usage de certains produits, règles de vie en société, etc. Ainsi, dans le monde entier, les produits à "usage unique" ont connu un retour en grâce, et une augmentation exponentielle de la consommation de protections jetables, (masques, gants, combinaisons, visières, etc.) s'est opérée. Alors que les dernières années ont vu se développer des velléités plus ou moins fortes de réduire les quantités d'équipements et objets en plastique à usage unique, la crise du Covid-19 a remisé au placard ces initiatives, au nom de la protection de la santé. Plus largement, la question de la gestion des déchets pendant la crise est également essentielle. Vouloir sortir du Covid-19 par le tout (plastique) jetable ne va t-il pas accentuer encore la crise mondiale des déchets, qui menace toutes les espèces, y compris l'espèce humaine à son origine ? Une crise silencieuse mais qui nous menace aussi sûrement à long terme que les virus émergents.

Le tout-plastique jetable pour se protéger du virus

Dès le début de la crise, les équipements médicaux de protection jetables sont devenus indispensables, notamment pour les professions médicales, intervenant auprès des patients souffrant de Covid-19, les plus exposées au risque: l’usage de charlottes, sur-blouses, masques, gants, etc. devant être changés régulièrement est devenu systématique a connu une hausse exponentielle, malgré un manque d’équipements de protection patent souligné par de nombreux/nombreuses professionnel.le.s dans diverses régions. En outre, EHPAD, établissements de soins, infirmières et infirmiers à domicile, etc. ont également dû se convertir à un usage systématique de ces protections, pour protéger leurs patients, et se protéger.

Notons ironiquement que le virus SARS-Cov-2 à l’origine du Covid-19 serait selon une étude du New England Journal of Medicine plus résistant sur les plastiques et l’acier inoxydable que sur d’autres types de matériaux comme le cuivre ou le carton, survivant jusqu’à près de 72 heures.

Equipements médicaux de protection et autres déchets jetables : hausse exponentielle


Pour illustrer la quantité de déchets produits en lien avec la crise du Covid-19, prenons l’exemple de la Chine : en date du 24 mars, depuis fin janvier, le pays avait dû traiter près de 182 000 tonnes de déchets médicaux. La capacité de la Chine en matière de traitement de ces déchets était ainsi passée à 6066 tonnes par jour, soit environ 4902 tonnes supplémentaires/jour par rapport à la période précédant l’épidémie.

En outre, d’autres types de produits, jetables, ont connu des pics de consommation/vente qui devraient ajouter encore au flux de déchets au niveau mondial. Aux Etats-Unis, les chiffres sont sans équivoque: ventes de papier toilette +112%, désinfectants en aérosol +343%, désinfectants pour les mains +313% – par rapport au même mois de l’année 2019. Que dire lorsque ces déchets ou d’autres similaires sont jetés par des individus indélicats dans la rue ou dans les canalisations (les lingettes jetées dans la cuvette des toilettes venant boucher les canalisations….)?

En parallèle, se pose la question du traitement des eaux usées, contaminées par le virus … Questions cruciales qui se posent dans tous les pays touchés par la pandémie.

Masques jetables: quelle composition?

Penchons-nous particulièrement sur les masques jetables. Ils sont de 2 types:

  • masques chirurgicaux: masque visant à éviter que le porteur ne rejette dans l’air des particules dit encore « anti-projections », pour éviter qu’il ne contamine les autres, ne protégeant pas contre l’inhalation de gouttelettes,
  • masques de protection respiratoire individuelle: type FFP2 pour « pièce faciale filtrante » par exemple, visant à protéger le porteur contre les risques d’inhaler des agents infectieux. Des FFP1, utilisés dans le bâtiment ou l’industrie agro-alimentaire filtrent jusqu’à 80% des particules dans l’air (de la taille de 0,6 micromètres), contre 94% pour les FFP2 et 99% pour des FFP3.

Mais quelle est la composition de ces masques ? Un masque FFP2 par exemple est composé de couches de fibres non tisées en polypropylène, la barrette nasale étant en polypropylène et acier, la couche dessous en polypropylène également, et l’élastique de maintien double sans latex. Les maques FFP2 sont composés de 2 types de matériaux composés de polymères synthétiques, donc de diverses formes de plastiques: polyamide, polyester, polypropylène, polyethylène, PVC, etc.

Comment traiter un déchet composé de divers types de plastiques? Un casse-tête bien connu des spécialistes du tri qui ne peuvent que se lamenter devant les assemblages de plastiques impossibles à séparer et donc valoriser – qui doivent inévitablement finir en déchetterie/décharge ou dans des incinérateurs.

Un coup d’arrêt donné aux velléités de réduction des plastiques et déchets?

Entre 2018 et 2020, après des décennies d’attentes et de mobilisation internationale, divers engagements ont enfin été pris en matière de réduction des déchets, plastiques notamment. En 2018, coup de semonce pour la communauté internationale : la Chine annonce dorénavant refuser l’importation et le traitement de déchets venus de l’étranger a secoué la communauté internationale : en 2019, les pays d’Asie du Sud-Est, vers lesquels ces flux massifs et ingérables s’étaient reportés ont opéré des retours à l’envoyeur (Canada, Etats-Unis, France, Australie, etc.). A l’été 2019, des amendements à la Convention de Bâle sur le commerce transfrontalier des déchets dangereux des amendements ont fait date: renforcer le consentement préalable à l’importation de ces déchets, et ses conditions, minimiser les déchets et renforcer leur gestion pour réduire ses impacts environnementaux. Dans l’UE, une Stratégie pour réduire les déchets, notamment plastiques a vu le jour en 2018 , déclinée dans plusieurs pays de l’UE, dont la France, à travers une Feuille de route pour l’économie circulaire.

Un élan stoppé par la crise du Covid?

Sans surprise, dès le début de la crise du Covid-19, de nombreuses voix venues de fabricants de plastique et de produits en plastique à usage unique se sont élevées pour demander de repousser les obligations réglementaires prévues par la Directive sur les plastiques à usage unique, prétextant la protection de la santé. La directive prévoyait de réduire drastiquement les 4 à 12 tonnes de déchets plastiques qui finissent chaque année dans les océans. La Commission européenne a heureusement tenu bon, pour l’instant, précisant que des dérogations sont prévues pour les dispositifs médicaux…

Les Nations Unies, à travers les conventions en charge des produits chimiques, ont publié une « fact sheet » sur la gestion sûre des équipements de protection et déchets médicaux. Stockage, règles de tri, de traitement, etc. les recommandations sont complètes. Mais combien de pays ont-ils les capacités et la volonté de les mettre en oeuvre? D’ores et déjà, les éboueurs sont en première ligne du flux incessant de déchets, et les incivilités en la matière ont repris de plus belle avec le déconfinement, comme le signalent par exemple les Eboueurs de Paris. Peut-on encore laisser perdurer ces comportements?

Les alternatives au jetable

En attendant, devant les difficultés, au plus fort de l’épidémie, d’accéder à des masques jetables pour l’ensemble de la population, la fabrication de masques de protection réutilisables a connu un boom : aujourd’hui, des collectivités publiques les distribuent ou les mettent à disposition de leurs administrés, tandis que de nombreuses couturières bénévoles ou des entreprises se lançaient dans la confection de masques. Puis sont venus les modèles proposés par l’Afnor.

Les masques réutilisables en tissu, sont bien sûr une alternative durable aux masques jetables, même si leur efficacité pourrait être moindre? D’autres imaginent également des masques jetables « biodégradables », afin de limiter les pollutions. L’appât du gain attirera sans nul doute de nouveaux acteurs sur ce créneau des masques: limiter les quantités de déchets générés doit être une priorité, car la crise du Covid-19 n’a pas fait disparaître les autres, qui sont tout autant préoccupantes.