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Marée noire à l’Ile Maurice : à quand la fin des pavillons de complaisance ?

Marée noire à l’Ile Maurice : à quand la fin des pavillons de complaisance ? L'Ile Maurice dans l'Océan Indien est connue pour ses atolls, ses lagons, ses coraux et sa riche biodiversité marine, qui fondent aussi son économie touristique. Mais depuis quelques jours, elle fait face à un désastre écologique, suite à l'échouage dans ses eaux le 25 juillet du navire le Wakashio, navire japonais battant pavillon panaméen, transportant environ 4000 tonnes de fuel: plus de 1000 tonnes de fuel se sont déjà répandues dans les eaux, suite à une percée dans la coque le 6 août. Deux sites de l'île classés par la Convention internationale Ramsar pour la protection des zones humides sont directement menacées et c'est un véritable désastre qui s'annonce pour la biodiversité marine de la zone, et plus largement pour les populations locales.

La situation à l’Ile Maurice

source : AFP maps4news.com / crédit HERE

Deux zones riches en biodiversité menacées

La marée noire menace deux sites de l’Ile classés zones humides d’importance. Il s’agit du Parc marin de Blue Bay et de la zone humide de la Pointe d’Esny, reconnues pour leur richesse en matière de biodiversité. Elles abritent une espèce de tortue verte en danger, 40 variétés de corail, 72 espèces de poissons, et une mangrove fragile et riche en biodiversité.

1000 tonnes de fioul déjà déversées

Le navire japonais battant pavillon panaméen transportait apparemment 4000 tonnes de fioul. Plus de 1000 tonnes se sont déjà échappées de la coque. Si le navire se brise en deux, 2500 tonnes supplémentaires pourraient contaminer les eaux. Le premier ministre a lancé un appel à l’aide internationale. Du côté des populations locales, on s’interroge sur l’inaction des activités depuis le 25 juillet, date de l’échouage.

Les moyens du bord pour sauver la zone…

Au cours du week-end, des milliers de volontaires ont tenté de stopper la marée noire et de sauver les animaux englués, avec les moyens du bord. France, Japon, ainsi que d’autre pays et l’Organisation Maritime Internationale ont annoncé leur aide. Mais les dégâts sont déjà visibles, et la mauvaise météo annoncée pour le week-end prochain fait craindre le pire.

Pavillons de complaisance : mis en cause dans plusieurs marées noires

Les pavillons de complaisance permettent à des armateurs de navires de réaliser des économies substantielles (fiscalité, salaires des équipages). Ils leurs permettent également déchapper le cas échéant à leurs responsabilités, comme dans le cas de marées noires.

Des pays connus pour leur largesses

En la matière, plusieurs pays sont particulièrement connus pour délivrer des pavillons de complaisance, cela en toute connaissance de cause des autres pays : Liberia, Panama, Bahamas, Iles Marshall, Malte, etc.

Liberté de la Haute Mer et ses conséquences

Selon le droit international maritime, c’est le « principe de la liberté » qui s’applique en Haute Mer. Voilà qui fait de la Haute Mer une zone de non-droit où « tout est permis » en Haute Mer (hors eaux territoriales ou zone économique exclusive de l’Etat côtier).

Cependant, le droit international maritime a évolué au gré des marées noires. La première d’ampleur, celle du Torrey Canyon (pavillon libérien) en 1967 débouche sur des groupes de travail. Il s’agit de mettre en place une réglementation du trafic maritime, d’établir les responsabilités en cas de pollution maritime, et poser les règles pour déterminer les responsabilités et le niveau de compensation des dommages.

Réglementer : des progrès depuis les années 70

En 1969 naît la Convention internationale sur la responsabilité civile pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures. Elle s’accompagne du FIPOL ( Fonds International d’indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures). En 1992, la portée du régime des fonds est élargie, pour mieux refléter la réalité. Depuis leur création en 1971, les fonds ont eu à connaître plus de 150 sinistres d’importance au niveau mondial.

France 3, Le Torrey Canyon, la première des marées noires
  • Suivront de nombreuses autres catastrophes : Amoco Cadiz (1978, pavillon libérien), Tanio (pavillon malgache, 1980), Erika (1999, pavillon maltais), Prestige (2002, pavillon des Bahamas), etc.
  • En France et au sein de l’Union européenne, des réglementations et des précautions sont prises au fur et à mesure que surviennent de tragiques catastrophes. En 1978 est lancé le plan POLMAR en France. Suivront les « paquets Erika I, II et III » au niveau de l’UE au début des années 2000.
  • Les mesures prises visent par exemple à : rendre obligatoire les contrôles dans les ports, s’assurer que les navires ont une double coque, renforcer la fiabilité des sociétés en charge des contrôles, etc. Autre avancée majeure: l’affaire de l’Erika débouche en 2010 sur la reconnaissance de la notion de préjudice écologique.

Comme le montre la situation actuelle à l’Ile Maurice, les marées noires sont un fléau sur l’ensemble du globe: combien de temps faudra t-il pour harmoniser les règles et faire cesser des pratiques dangereuses autant pour les écosystèmes que pour les droits sociaux des marins engagés sur les navires? Si les règles s’améliorent, il reste encore de progrès à faire pour voir disparaître les « navires-poubelles », renforcer les contrôles, réduire les pollutions liée au trafic maritime, assurer la sécurité des transports pour éviter de détruire irrémédiablement une biodiversité déjà agressée par l’ensemble des activités humaines.

En complément, voir le documentaire Qui contrôle la mer?