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public Climat et développement territorial

Genre et finance climat : Quelles avancées, quelles ambitions ?

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Genre et finance climat : Quelles avancées, quelles ambitions ? Dans le cadre de la COP 24 à Katowice, le MTES et le MEAE se sont associés à CARE France, WECF et Adéquations, membres de la Plateforme genre et développement – pour organiser une rencontre-débat le 11 décembre 2018 sur la thématique de l’accès des femmes aux financements climat.

Ovais Sarmad, secrétaire exécutif adjoint de la CCNUCC, a ouvert la rencontre en évoquant le plan d’action sur le genre adopté lors de la COP23. Il constitue une étape essentielle dans la prise en compte du genre au cœur des enjeux climatiques. Rappelant que seul ce qui est compté compte, il a insisté sur l’importance de la production de données sensibles au genre.

Panel 1: Genre et finance climat, quelles avancées récentes ?

Ambassadrices climat : Brigitte Collet (France), Patricia Fuller (Canada)
ONG : Fanny Petitbon (CARE France), Shaughn McArthur (CARE Canada), Kalyani Raj (AIWC)

La France a rappelé son engagement pour porter la voix des femmes. Tout d’abord dans les textes, lorsque la France a poussé, lors de la COP 21, en faveur d’un langage très clair et fort dans l’Accord de Paris mentionnant le genre à 5 reprises ; ensuite sur le terrain, avec notamment le co-financement franco-canadien d’un atelier organisé à Dakar, en partenariat avec l’Institut de la Francophonie pour le Développement Durable et l’ONG WEDO, dédié à des négociatrices francophones africaines afin de leur donner les outils pour participer aux négociations de la COP24 à Katowice. A noter également qu’une étude menée dans le cadre de l’initiative CREWS, soutenue par la France, traite de la dimension genre en mettant en avant les différences d’impacts des catastrophes environnementales entre les femmes et les hommes. Il a également été rappelé la publication du plaidoyer lancé en marge du One Planet Summit par les membres de la Plateforme Genre et développement et soutenu par plus de 90 organisations de 35 pays intitulé « Pour des financements climat intégrant pleinement le genre » .

Le Canada a présenté sa politique internationale féministe sur le terrain de la lutte contre le changement climatique. Le Canada apporte notamment son aide à la lutte contre la pollution atmosphérique en Haïti en finançant l’Alliance mondiale pour des cuisinières propres contribuant à améliorer la qualité de vie des femmes tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre. Le Canada va prochainement présider le conseil des ministres de l’énergie, un des secteurs où les femmes sont les moins bien représentées. Ottawa soutient à ce titre la campagne « equal by 2030 » qui a pour ambition d’œuvrer en faveur de l’équité salariale, de la parité au sein des échelons supérieurs et de l’égalité des chances pour les femmes d’ici 2030. Autant d’initiatives qui illustrent le fort engagement politique du Canada sur le sujet du genre, y compris celui du Premier ministre Justin Trudeau qui a œuvré à ce que le genre soit abordé de façon transversale lors de la présidence canadienne du G7.

Les interventions de CARE Canada et de l’AIWC ont démontré la difficulté d’accès des femmes aux finances climat, au droit à la propriété, l’impact négatif de la spéculation sur le prix des terres et la hausse constante des baux agricoles. CARE Canada a souligné la préférence des bailleurs pour les gros projets d’atténuation top-down alors que les projets devraient intégrer les femmes dans les prises de décision via une approche bottom up, et être adaptés aux contextes différents, avec une approche locale. En dépit de ces défis, des communautés vulnérables mettent en place avec succès des solutions au changement climatique ; en atteste le projet mené par CARE Canada au Honduras avec l’appui du Canada . CARE et AIWC ont également rappelé le potentiel des financements climat intégrant pleinement le genre à apporter une réponse efficace aux enjeux d’injustice climatique et ont invité la communauté internationale, dont les pays membres du G7, à le prendre en compte dans leurs futures décisions sur les financements.

Panel 2 : Maximiser l’effet levier des financements climat à l’échelle locale

Valérie Masson-Delmotte (GIEC), Madeleine Rose Diouf Sarr (Sénégal), Karina Kolburn- Larsen (CTCN), Liane Schalatek (Fondation Heinrich Böll North America), Zenabou Segda (WEP Burkina Faso), Anne Barre (WECF)

Le GIEC a appelé à investir pour former des femmes scientifiques, encore trop peu nombreuses, pour travailler dans le domaine de la physique du climat et le développement d’une littérature scientifique axée sur les liens entre changement climatique et genre. Une avancée notable est l’existence d’un chapitre sur genre et finance au sein du groupe 1 du GIEC sur l’atténuation, dans lequel deux coordinatrices sont des femmes. Au-delà de la question du nombre, davantage de diversité permettrait de dépasser des biais inconscients, de changer notre manière d’interagir et ce avec des méthodes de travail plus inclusives. Sur le terrain, les femmes jouent déjà un rôle actif et fondamental dans la lutte contre la déforestation, dans la conservation et la restauration des écosystèmes, comme c’est le cas au Sénégal. Cependant, leurs actions pourraient être démultipliées par la mise en place de financements innovants s’appuyant notamment sur les structures régionales et locales. Au Burkina Faso, WEP mène un programme national d’économie circulaire et de symbiose industrielle impliquant une centaine de micros, petites et moyennes entreprises, dont 45% dirigées par des femmes. Ce programme a permis une importante réduction de déchets polluants et d’émissions de gaz à effet de serre, une diminution de la quantité d’extraction de matières premières et une importante économie d’énergie. La diversification économique et la création d’emplois a été renforcée par la mise en place de plateformes régionales et nationales.

Liane Schalatek a expliqué comment les approches de micro-crédit permettent de renforcer la participation d’intermédiaires financiers locaux et leur engagement dans l’entreprenariat de petite échelle. La finance climat publique peut soutenir ce type d’approche en fournissant une garantie risque aux entrepreneuses largement représentées, souvent dans le secteur informel. Les approches doivent être focalisées sur les entreprises de très petite taille. Les micro-entreprises sont la colonne vertébrale du développement local et par conséquent, les lignes de crédit vert doivent être étendues en priorité à ce segment du secteur privé, afin d’adopter une approche sensible au genre. Une étude réalisée en 2017 par WECF et la Fondation Heinrich Böll dans 8 pays d’Europe de l’Est, analyse les coopératives d’énergie comme modèles pour favoriser la transition vers les énergies renouvelables. Elles peuvent renforcer l’inclusion économique et la participation des femmes, notamment à travers la mise en place de statuts paritaires ou en facilitant l’achat de parts dans ces coopératives.
Karina Kolburn- Larsen a rappelé que Le Climate Technology Centre and Network fournit l’assistance technique et permet le transfert de technologies sur demande des gouvernements et des ONG en intégrant la question du genre. Le CTCN favorise également l’accompagnement et l’aboutissement de projets déployant des solutions à l’échelle d’un territoire, en fournissant une expertise appropriée aux besoins spécifiques des femmes.

Compte-rendu de la rencontre-débat
COP24 – 11 décembre 2018