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COP24, quel bilan en tirer ?

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COP24, quel bilan en tirer ?

À l’heure où la mobilisation pour le climat est retentissante, comme en témoignent l’Affaire du Siècle ou la grève scolaire qui rassemble des milliers de jeunes à travers la planète, WECF revient sur la COP24, qui s’est tenue à Katowice en décembre 2018. Les demandes de la société pour que les mesures politiques devant faire face aux changements climatiques soient accompagnées d’une justice sociale, sont aujourd’hui très fortes. Dans ce contexte, quel bilan pouvons-nous dresser des résultats de cette 24ème conférence des parties? En quelques mots, on peut se réjouir que les conditions générales de mise en œuvre de l’Accord de Paris aient été définies à travers l’adoption d’un manuel d’application. Ceci permet d’opérationnaliser concrètement cet accord historique adopté en 2015. Néanmoins, les textes de Katowice manquent vraiment d’ambition face à l’urgence d’agir, qui a pourtant été une nouvelle fois démontrée dans le rapport alarmant du GIEC, publié en octobre 2018. La volonté de lutter activement et durablement contre le dérèglement climatique et ses répercussions a fait cruellement défaut en Pologne. Nous attendons toujours une impulsion politique pour des stratégies climat ambitieuses et bâties sur le respect des droits humains, notamment en intégrant systématiquement l’égalité de genre.

Des avancées techniques nécessaires mais insuffisantes

Afin de rendre plus fiable le suivi des politiques climat de chaque pays, les mécanismes d’élaboration des plans d’actions nationaux, ou contributions déterminées au niveau national (CDN), ont été précisés pendant la COP24. WECF salue les nouvelles lignes directrices adoptées, car elles incluent l’obligation pour les États de préciser la manière dont la participation publique, en particulier celle des peuples autochtones, est prise en compte. Cependant, nous déplorons que ces nouvelles règles ne permettent pas de faire un lien clair entre CDN, révisées tous les 5 ans, et stratégies de long terme (2040 ou 2050), notamment au regard des objectifs de neutralité carbone.

En parallèle des CDN, un nouveau mécanisme de transparence a été adopté prévoyant des règles communes pour évaluer les émissions nationales de gaz à effet de serre (GES) et les avancées ou difficultés rencontrées dans l’application des plans d’actions. Ces nouvelles règles de mesure et d’évaluation visent à renforcer la crédibilité et l’efficacité de l’engagement des pays. Cependant, les rapports de transparence arriveront trop tard pour être inclus dans le bilan mondial de 2023 et les enseignements tirés échoueront donc à être intégrés dans les nouveaux plans d’action de 2025. (voir sur ce point le décryptage du Réseau Action Climat)

Concernant les financements, nous saluons le montant de 128 millions de dollars accordé au Fonds d’adaptation, le fonds consacré aux pays les plus vulnérables. Les annonces de nouvelles contributions au Fonds Vert par l’Allemagne, la Norvège et la Banque Mondiale sont aussi un point positif, mais les montants restent très insuffisants. Les discussions autour des mécanismes du marché carbone n’ont, quant à elles, pas été fructueuses : la décision a été repoussée à la prochaine COP. Par ailleurs, les règles adoptées pour dresser le bilan mondial des activités collectives des pays (global stocktake) ne contiennent aucune référence aux Objectifs de développement durable (ODD) et la société civile ne pourra pas participer aux réunions, mais seulement fournir des contributions écrites.

Un manque d’ambition cruel face à l’urgence d’agir

Le problème majeur de la COP24 porte sur un double manque d’ambition: les pays n’ont pas su répondre à l’urgence de la situation, et la notion de justice climatique a fait défaut pendant les négociations. Malgré l’appel urgent à limiter la hausse des émissions de GES à 1,5°C, les États se sont dérobés devant leurs responsabilités pour rendre leurs politiques climat plus justes et inclusives. Outre le manque d’ambition et de considération pour les droits humains, l’égalité de genre n’est pas mentionnée dans les chapitres relatifs aux transferts de technologie ou aux financements.

WECF encourage les États à aller plus loin dans leurs politiques et à assurer une justice climatique en y intégrant la promotion des droits humains et de l’égalité de genre. Le Prix Solutions Genre et Climat, organisé par la WGC montre l’exemple, en valorisant des cas pratiques de stratégies climat sensibles au genre, qui, mises à l’échelle, peuvent avoir un impact significatif en termes d’atténuation et d’adaptation. Ce Prix, mais aussi l’atelier de renforcement de capacités destiné aux lauréat.e.s, et leur accompagnement par les membres de la WGC, visent à démontrer le potentiel inexploité des femmes en tant qu’actrices fondamentales de la protection du climat.

Lors du débat « Genre et Finance Climat » co-organisé sur le pavillon France par les Ministères de la transition écologique et des affaires étrangères avec CARE, Adéquations et WECF, nous avons montré comment des structures économiques adaptées permettent de donner aux communautés locales accès à des solutions énergétiques abordables. Ces propositions ont été reprises pendant le Gender Day.

Le Plan d’Action Genre doit poursuivre sur sa lancée

La COP24 a permis de faire un bilan positif de la mise en œuvre du Plan d’Action Genre (GAP), et d’engager son futur renouvellement. Cependant beaucoup reste à faire pour que ce travail modifie sensiblement l’approche des États, des organes de la CCNUCC ou des grandes instances financières dans l’élaboration et le choix des politiques climat.

Le fait que la mention des pertes et dommages, ces impacts climatiques déjà subis dans de nombreux pays, aient été rayée des textes à Katowice, illustre de manière flagrante ce manque de prise en compte des inégalités de genre. En effet, on sait que les femmes sont davantage affectées par les cyclones, sécheresses ou autres catastrophes climatiques, en raison des inégalités structurelles de nos sociétés. La COP24 aurait dû permettre de s’accorder sur un mécanisme financier visant à mieux prévenir ces catastrophes et à mieux coordonner les interventions humaines et la reconstruction nécessaires dans les pays les plus touchés.

Les véritables solutions pour le climat doivent impérativement promouvoir un accès et un contrôle égalitaires des ressources productives, et une participation des femmes dans les processus de décision politique. Il faut investir davantage dans les stratégies d’adaptation afin de préserver les moyens de subsistance des communautés, aujourd’hui assurés principalement par les femmes. Il est essentiel que les États soutiennent politiquement et financièrement ces approches.

Pour plus d’informations, vous pouvez consulter les demandes clefs de la Constituante Femmes et Genre, ou l’analyse détaillée des résultats de la COP24 publiée par le Réseau Action Climat.