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Bilan de la triple COP à Genève du 24 avril au 5 mai 2017

Bilan de la triple COP à Genève du 24 avril au 5 mai 2017 Bâle/Rotterdam/Stockholm réunies pour un même objectif !

Les conventions de Bâle, Rotterdam et Stockholm partagent un même objectif, celui de protéger la santé humaine et l’environnement des produits chimiques et déchets dangereux. Au cours des récentes négociations, elles ont fait, toutes les trois de bons progrès dans la réduction de l’usage des substances toxiques et la promotion des alternatives plus écologiques et saines pour notre environnement.

Les chiffres de la triple COP 2017

Des avancées significatives ont eu lieu lors des récentes COP des conventions de Bâle, Rotterdam et Stockholm.Ces négociations ont réuni plus de 1300 participants, dont 170 États pour tenter de trouver un consensus sur les enjeux des déchets et produits chimiques dangereux. 80 ministres ont participé aux débats lors du derniers jours, clôturant ces 2 semaines de négociations commencées le 24 avril.

Le fonctionnement de la triple COP

Pour qu’un produit chimique ou un pesticide soit soumis aux obligations prévues par les conventions, il doit être inscrit sur les listes des annexes. Ce sont les États parties aux conventions, qui se réunissent tous les 2 ans au sein des COP (conférences des parties) qui décident si oui ou non un produit chimique ou un pesticide va être listé. Au préalable un comité composé d’experts scientifiques indépendants émet des recommandations sur ajouter des substances aux listes.

Pour la convention de Rotterdam quand un produit dangereux est listé, l’importateur doit être informé de sa dangerosité. La convention crée un droit à l’information pour l’importateur et une obligation d’informer pour l’exportateur. Bien souvent, des produits dangereux sont utilisés en plus grande quantité et à plus grande fréquence dans des pays en développement ou émergents.
Informer ne revient pas à interdire, cependant ceux qui sont informés peuvent prendre une décision en toute connaissance de cause, et savoir ce qu’ils importent sur leur territoire. De nombreuses parties ont exprimé leur volonté d’assurer un meilleur échange d’information sur les produits.

Dans le cadre de la convention de Stockholm, si un produit est listé, il est interdit à la production et des mesures sont prises pour assurer son élimination du marché. C’est le cas par exemple des PCB, des dioxines et des furanes.

Les avancées de la COP

Les parties à la convention de Bâle ont pris d’un certain nombre de décisions importantes, y compris la création d’un nouveau partenariat public-privé sur les déchets ménagers pour aider les pays à s’attaquer à cette question de plus en plus préoccupante et commencer à lutter contre les déchets maritimes, un défi majeur de notre époque. Pour la convention de Bâle, sur le contrôle des déchets dangereux transfrontaliers, les États ont voté l’élimination des anciens ordinateurs et accessoires.

Les parties à la convention de Rotterdam ont ajouté 3 nouvelles substances chimiques dangereuses à l’Annexe III, dont deux pesticides : le carbofuran , le trichlofon et un produit utilisé dans l’industrie les SCCPs. La COP a aussi ajouté le TBT (tributyletain) aux produit chimiques industriels. Cependant aucun accord n’a été trouvé pour l’amiante chrysolite ni le carbosulfan et des pesticides comme le paraquat (un pesticide hautement toxique pour l’homme, les animaux, les insectes et l’environnement en général) et le fenthion.

Les parties à la convention de Stockholm ont listér tous les POP recommandés dont le DecaBDE, les SCCP dans l’annexe A et le HCBD dans l’annexe C.

Les substances ajoutées dans le cadre des conventions

Convention de Rotterdam :

  • Carbofuran : un insecticide, vendu sous le nom de Furadan, utilisé dans la production de fruits et légumes, qui a des impacts négatifs sur l’environnement, y compris sur les oiseaux, les petits mammifères et les abeilles,
  • Trichlorfon : insecticide ou pesticide connu sous le nom de Cekufon 80 SP en Europe, Dipterex au Brésil et ailleurs, utilisé sur les fruits et légumes, causant des effets neurotoxiques et cancérogènes aigus et des impacts sur la reproduction humaine et le système endocrinien.
  • Les paraffines chlorées à chaîne courte (SCCP) : un produit chimique industriel avec de nombreuses appellations commerciales, dont Chlorowax, A70 (cire) et Chlorofo, utilisé comme liant dans les peintures, dans les matières plastiques et revêtements mais aussi comme retardateur de flamme pour le caoutchouc, les matières plastiques et textiles. De nombreuses traces ont été trouvées dans l’air, les cours d’eau et les sédiments ce qui présente des risques particuliers pour les organismes vivant dans le sol et les écosystèmes aquatiques. Les SCCP sont parfois présentes dans les jouets ou articles pour enfant. Une étude de l’IPEN a démontré sa toxicité et répertorie quelques articles contaminés (ajouter le lien vers cette étude).
  • Composés de tributylétain (TBT) : un pesticide / produit chimique industriel vendu sous l’appellation Biomet et Intersmooth, utilisé le plus souvent dans les peintures anti-fouling pour les coques de navires et comme biocide dans les produits de protection du bois.

Convention de Stockholm

  • DecaBDE : utilisé comme retardateur de flamme, y compris dans les plastiques, les textiles, les adhésifs, les produits d’étanchéité, les revêtements et les encres. Les plastiques contenant du DecaBDE sont utilisés dans les équipements électriques et électroniques, les fils et les câbles, les tuyaux et les tapis. Ils sont transportés sur de longues distances et avec des effets nocifs importants sur la santé humaine et l’environnement, y compris les effets néfastes sur le système reproductif pour un certain nombre d’espèces. Ils ont également des effets neurotoxiques et perturbent le système endocrinien.
  • Paraffines chlorées à chaîne courte (SCCP)  : voir ci-dessus selon la Convention de Rotterdam.
  • Hexachlorobutadiène (HCBD) : polluant organique persistant déjà énuméré dans l’Annexe A de la Convention de Stockholm, figurant maintenant dans l’Annexe C. Il est couramment utilisé comme solvant pour d’autres composés contenant du chlore, provoquant une toxicité systémique après exposition par voie orale, par inhalation et par voie cutanée. Les effets peuvent inclure la dégénérescence du foie, la néphrite nécrosante épithéliale, la dépression du système nerveux et la cyanose.

Des substances non listées mais au cœur des débats : le cas du Paraquat

En Inde, le paraquat est largement utilisé dans de mauvaises conditions, ce qui augmentent les risques pour la santé.Les problèmes de pauvreté sont exacerbés par l’exposition à ce pesticide hautement dangereux, car les utilisateurs n’ont pas les moyens de s’en protéger ou d’obtenir des informations pertinentes. Dans certains endroits, le paraquat est vendu dans des sacs en plastique ; De nombreux utilisateurs ne peuvent pas lire l’étiquette ; Il est mélangé avec d’autres ingrédients qui ne sont pas recommandés ; Il est pulvérisé avec des pulvérisateurs à doigts ; Et il est appliqué sur des cultures pour lesquelles son utilisation n’a pas été approuvée. Aucune recommandation n’est faite concernant les mesures de protection personnelle sur la manipulation du paraquat. En particulier, lorsqu’il est vendu dans des sacs en plastique, le risque d’exposition et d’empoisonnement est plus élevé dû au déversement, à l’inhalation et au contact direct.

L’avis des États parties

La Suisse globalement satisfaite. Malgré un manque de progrès pour limiter l’usage l’amiante et du paraquat,la Suisse est largement satisfaite des résultats de la triple COP

“Nous avons obtenu bien plus que nos attentes initiales” déclare Franz Perrez directeur des affaires internationales à l’Agence fédérale de l’environnement.

Le représentant suisse regrette que plusieurs États aient demandé la réforme du système de vote de la convention : en effet, la règle veut que les parties décident par consensus. Mais cette pratique aboutit à un blocage, lorsque plusieurs parties, même en petit nombre, refusent l’inscription d’un produit ou d’une substance pendant plusieurs COP : l’inscription peut alors prendre plusieurs années, puisque les COP se réunissent tous les 2-3 ans. Plusieurs Etats, dont ceux qui sont importateurs des produits dangereux et dont les populations sont exposées, ont donc demandé de modifier les règles de la convention, en instaurant un vote, qui permettrait l’adoption de décisions à la majorité. Les États défendant le consensus, comme la Suisse, regrettent cette demande.

L’inde, ambiguë sur le cas de l’amiante chrysotile

Les écologistes accordent une attention particulière à la position de l’Inde sur l’amiante chrysotile, une substance qui a été interdite dans de nombreuses régions du monde parce que cancérigène, mais n’est pas répertoriée comme une substance dangereuse en vertu de la Convention de Rotterdam qui réglemente le commerce des substances dangereuses.
« L’amiante chrysotile devrait être classé comme substance dangereuse en vertu de la convention de Rotterdam », explique Gopal Krishna, de Toxics Watch Alliance, une organisation non gouvernementale basée en Inde, qui ajoute que : « la convention oblige seulement les exportateurs à obtenir le consentement préalable du pays importateur ».
La position de l’Inde sur cette substance est loin d’être cohérente.
En 2011, la délégation indienne s’est prononcée en faveur de l’inclusion dans la liste, recevant une ovation de la part des ONG pour sa prise de position. En 2013, elle est revenue sur sa position sur la base d’une étude menée par l’Institut national de la santé au travail, qui a été largement discréditée.
L’année dernière, le ministre de l’environnement de l’État, Anil Madhav Dave, a déclaré qu’il cherchait des solutions de substitution à l’amiante, tout en soutenant qu’il n’y avait pas d’études menées par l’Inde prouvant l’impact de l’amiante chrysotile sur la santé.

Les syndicats mobilisés pour réduire les expositions professionnelles

Les syndicats des travailleurs industriels ont critiqué le 6ème échec de la tentative d’inscription de l’amiante chrysotile sur la liste des substances chimiques dangereuses. De plus, aucun accord sur l’herbicide paraquat n’a été trouvé.

Les plus grands producteurs et les plus gros importateurs d’amiante chrysotile ont bloqué les propositions d’inclure ce produit à la liste de Rotterdam. En 2015, 8 pays s’y étaient opposé : la Russie, le Kazakhstan, l’Inde, le Kirghizistan, le Pakistan, Cuba et le Zimbabwe. La Russie en est le plus gros producteur et l’Inde le plus gros importateur.

L’amiante chrysotile est une catégorie d’amiante. Le secteur ’industriel représenté a clamé qu’il n’était pas un produit chimique dangereux pour la santé comme les autres amiantes. Il est couramment utilisé dans le ciment de construction dans les pays en développement.
Cependant plus de 50 pays dont les membres de l’Union européenne, le Japon et l’Australie ont interdit son utilisation.

Pourtant, selon l’OMS, il est peut être moins dangereux mais il n’en est pas moins inoffensif.
L’amiante a été classée comme cancérigène par l’Agence internationale de recherche contre le cancer.

Les avis des ONG

Pour Kathleen Ruff, de RightonCanada,“la 8ème conférence des parties de la convention de Rotterdam a pris fin le 5 Mai 2017, la prochaine aura lieu en 2019″.

« Depuis le début, l’industrie de l’amiante refuse d’ajouter l’amiante chrysotile à la liste de la convention, même si cette substance répond à tous les critères pour y être inscrite. En refusant le consensus, la Russie et le Kazakhstan, probablement influencés industrie de l’amiante, ont tout simplement refusé d’appliquer la convention”.

L’intervention de l’IPEN lors de la clôture des convention

A l’issue de la convention, l’IPEN a fait la déclaration suivante :
« Chers présidents et distingués délégués. Je m’appelle Pamela Miller et j’ai le privilège d’être coprésidente d’IPEN, un réseau d’organisations de 100 pays du monde entier travaillant ensemble pour un avenir sans toxiques pour tous.
Nous avons participé à ces deux dernières semaines de débats en tant que membres de la société civile pour témoigner pour les milliards de personnes dans le monde qui ne pouvaient être ici, mais dont la santé, le bien-être et les droits sont affectés par les décisions qui ont été prises. Nous représentons des communautés vulnérables de femmes, d’enfants et de travailleurs. Nous sommes troublés par l’exposition disproportionnée des communautés autochtones de l’Arctique, d’Afrique et d’Océanie, et ailleurs dans le monde. Nous sommes au courant de la pandémie des maladies et des effets transgénérationnels causés par les expositions aux toxiques.
Nous espérons que les délégués feront tout leur possible pour respecter les promesses des conventions : conserver la promesse d’agir de manière préventive afin d’éliminer les expositions néfastes qui affectent la santé et les droits de l’homme. En 2001, il y a 16 ans, la communauté mondiale a adopté la convention de Stockholm, promesse d’éliminer certains des produits toxiques les plus toxiques au monde, les « POP ». Nous croyons que cette COP était une occasion manquée de créer un futur sans toxique.
Il sera difficile de faire notre travail en tant que société civile si nous sommes exclus de la participation aux travaux de la conférence des parties et à ses activités intersessions. Nous sommes extrêmement préoccupées par les compromis de la convention qui énumère des produits chimiques avec de longues listes d’exemptions injustifiées et prolongées, comme dans le cas du DecaBDE et des SCCP. Nous craignons que les normes relatives au faible contenu en POP ne soient pas protectrices pour la santé. Le recyclage des POPs dans les produits de tous les jours est déraisonnable et constitue une violation de la convention. Il doit également y avoir une voie à suivre pour mettre fin à l’impasse dans la convention de Rotterdam et lister à juste titre des produits chimiques tels que le paraquat et l’amiante chrysotile qui répondent aux critères de la convention. Alors que ces négociations s’achèvent, nous vous demandons de protéger le droit de la société civile à participer pleinement en qualité d’observateurs.
Demain, nous reviendrons dans les communautés dans lesquelles nous vivons et travaillons et où les enfants sont exposés à des produits chimiques dangereux dans leur vie quotidienne. Nous continuons à voir les gens souffrir et mourir. Pour conclure, nous voudrions rappeler la déclaration préliminaire du Directeur exécutif adjoint du PNUE, en ouverture des négociations, qui a déclaré : « Nous avons la responsabilité morale d’agir lorsqu’il y a un doute, et non pas lorsque les victimes apparaissent. » Nous espérons avoir l’opportunité de travailler avec vous de manière constructive et collaborative à mesure que les choses avancent.