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Climat Genre

COP 28: La fin de l’ère des énergies fossiles est arrivée, mais la bataille pour la justice climatique reste à mener

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COP 28: La fin de l’ère des énergies fossiles est arrivée, mais la bataille pour la justice climatique reste à mener

Dubaï, Émirats Arabes Unis La Constituante femmes et genre (WGC), dont WECF fait partie, partage ses réflexions sur les résultats de la COP28. Nous mettons l’accent sur notre travail, tel que nous l’avons conduit à Dubaï, guidé par notre engagement  pour démanteler l’oppression et les inégalités, en témoignant du génocide et de l’occupation, des atrocités perpétrées en Palestine, au Soudan et au Congo, et dans de nombreuses régions du monde, par des puissances coloniales militarisées tirant leur pouvoir des énergies fossiles. Nous affirmons qu’il ne peut y avoir de justice climatique sur des terres occupées, ni de justice climatique sans droits humains et nous appelons à un cessez-le-feu partout et maintenant.

Les résultats de la COP28 témoignent à nouveau d’un processus qui ne sert pas les communautés à travers le monde alors qu’elles ont désespérément besoin d’un changement de cap historique pour assurer notre survie collective. Nous, mouvements féministes, nous sommes battu·es avec acharnement – et nous continuerons à le faire – pour que la fin de l’ère des combustibles fossiles advienne de manière juste et équitable, avec une transition qui mette l’accent sur les droits humains, l’égalité des genres et les soins. Pourquoi avoir attendu autant d’années pour appeler à une transition hors des combustibles fossiles ? Bien qu’essentielle, la décision de la COP, pleine de fausses solutions et de distractions dangereuses, menace tout espoir de maintenir en vie l’objectif de 1,5° et met en péril la survie même des peuples de cette planète.

Un résultat qui n’affirme pas clairement la fin du système extractiviste ayant porté préjudice, assassiné et détruit les terres et les corps dans la plupart des pays de ce globe, ne peut pas être applaudi comme garantissant une justice de genre. Un résultat qui ne place pas l’ambition au cœur de la mise en œuvre et qui ne rétablit pas la confiance ni la solidarité mondiale indispensables à une véritable action climatique – avec un engagement clair en faveur de financements publics nouveaux et additionnels sous forme de subventions – est un résultat sans équité, sans égalité de genre et sans justice climatique.

« Si le pouvoir des citoyen·nes nous a permis d’inclure enfin, après 30 ans, la référence à une transition hors des combustibles fossiles dans le texte final de la COP, envoyant ainsi un signal important que les jours des pollueurs sont comptés, le combat n’est pas terminé. Le Bilan Mondial, nous fait faire un pas en avant, mais nous ramène aussi en arrière en ouvrant grand la porte aux distractions dangereuses que sont le captage et le stockage du carbone, le nucléaire, ainsi que les autres fausses solutions qualifiées de « carburants de transition » ou d”approches net-zéro”. Nous ne retrouvons pas dans ce texte la sortie complète, juste, rapide, féministe et pleinement financée des combustibles fossiles, dont nous avons besoin pour garder en vie l’objectif de 1,5°C, et pour assurer la survie des populations sur notre planète.  Et bien que le Bilan Mondial reconnaisse l’importance des approches intégrant le genre comme moyens d’action climatique pour l’avenir, les références à la protection, au respect, et à la promotion des droits humains sont largement absentes de la décision, et ne guident pas ses mandats et engagements en tant qu’obligations transversales pour aller de l’avant. Par exemple, la décision n’appelle pas les Etats Parties à renforcer la collecte et l’utilisation de données ventilées par sexe et genre dans leur prochaine série de Contribution Déterminée au niveau National (CDN) ». – Mwanahamisi Singano, responsable des politiques globales, WEDO. 

« À Dubaï, il n’y a pas eu de nouveaux engagements sur le financement apporté par les pays développés aux pays en développement pour soutenir leur ambition climatique, alors que les engagements anciens, comme l’objectif des 100 milliards de dollars par an, n’ont toujours pas été respectés. Dans toutes les salles de négociations sur les financements climatiques, les pays développés ont minimisé, voire ouvertement nié leur responsabilité historique et leur obligation de payer leur dette. Ils ont préféré prôner des contributions volontaires et affirmer que les revenus du secteur privé et du marché carbone combleraient les déficits massifs et croissants de financement. » – Tetet Lauron, Rosa Luxemburg Stiftung“

« Nous sommes très déçues, en tant que féministes, de n’avoir fait aucune avancée majeure pour financer l’action climatique locale transformatrice en matière de genre, et basée sur les droits humains, notamment à travers un accès simplifié et direct. Très peu d’argent est accessible aux personnes et communautés en première ligne du changement climatique, en particulier aux femmes et aux groupes défendant l’égalité de genre à l’échelle locale. Après ces échecs sur les financement à la COP28, il sera encore plus important que le Nouvel Objectif Collectif Quantifié (NCQG) pour la finance climat, qui sera approuvé à la COP29, réponde aux besoins, en tenant compte de la science, et soit négocié tout au long de l’année de manière participative et inclusive, avec la participation significative des femmes et des groupes travaillant sur le genre, des peuples autochtones et des groupes historiquement marginalisés ou exclus ». – Tara Daniel, directrice de programmes, WEDO

« Nous reconnaissons la décision établissant le Fonds Pertes et Dommages, mais nous ne pouvons pas partir avec le sentiment d’avoir atteint notre objectif dans ce domaine. Nous avons bien entendu les promesses faites pour des centaines de millions de dons jusqu’à présent, mais tout n’est pas nouveau ni additionnel; et les besoins se chiffrent en centaines de milliards. Nous avons également entendu les pays développés affirmer qu’ils ne se sentent pas obligés de payer pour les pertes et dommages – il s’agit là d’un déni de justice climatique, de leur dette climatique et de leur responsabilité historique. Le financement des pertes et dommages doit être inclus dans le nouvel objectif financier de l’année prochaine, le nouvel objectif collectif quantifié (NCQG), en tant que troisième pilier de financement, avec des financements additionnels à ceux prévus pour l’atténuation et l’adaptation. – Liane Schalatek, directrice associée, Fondation Heinrich Böll

« En tant que féministes, nous considérons qu’une transition juste est essentielle pour parvenir à un changement de système, s’occuper de la santé de la planète, résoudre la crise climatique et les injustices qui y sont associées, transformer les institutions sociales, reconfigurer le pouvoir dans les sphères publiques et privées, et réinventer la gouvernance mondiale en mettant l’accent sur le bien-être plutôt que sur la richesse matérielle. Nous avions de grands espoirs et des demandes spécifiques pour le programme de travail sur la transition juste. Nous exigeons qu’il prenne en compte le travail de soins, le respect des droits humains et des droits du travail, qu’il prenne des dispositions solides pour le dialogue social et la participation de la société civile, et des décisions fortes et applicables pour faciliter la coopération internationale sur l’accélération d’une transition juste à l’échelle mondiale selon les principes d’équité et des responsabilités communes mais différenciées.  Or, nous sommes profondément déçues que le programme de travail sur la transition juste se soit lui aussi transformé en un forum de discussion sans résultats appropriés – où les droits sont ignorés, édulcorés ou carrément absents. Nous insistons sur la nécessité d’une transition juste qui donne la priorité aux soins et qui produise des résultats solides, un dialogue social significatif et le respect des droits humains et des droits du travail. – Ayshka Najib, Groupe de travail féministe de la Constituante WGC MENA

« Les communautés du monde entier, principalement les femmes, les enfants, les personnes âgées, les personnes handicapées et les populations autochtones, subissent les premières et les plus dures conséquences du changement climatique. Elles ont un besoin urgent de mesures d’adaptation qui les aident à survivre et à s’épanouir dans un environnement en constante évolution. Nous sommes terriblement déçu⋅es de constater que les Parties à la COP28 ont eu tant de mal à se mettre d’accord sur les éléments clés permettant de renforcer les capacités d’adaptation et d’améliorer la résilience des plus vulnérables. Nous soulignons la nécessité d’augmenter rapidement les financements pour l’adaptation en les rendant accessibles, traçables et sur le long terme. Ces financements devraient être conformes à l’engagement des pays développés d’au moins doubler le financement de l’adaptation d’ici 2025, tout en reconnaissant que le déficit financier réel pour l’adaptation est encore bien plus important, et que donc le doublement du financement de l’adaptation ne représente qu’un plancher. Il est également évident que les pays en développement ont besoin de finance, de transfert de technologie et de renforcement de capacités pour formuler et mettre en œuvre leurs Plans Nationaux d’Adaptation (PNA), ainsi que pour suivre et mesurer leurs actions d’adaptation. Il est donc d’autant plus décevant que les Parties ne parviennent pas à s’accorder pour faire de l’Objectif Mondial en matière d’Adaptation (GGA) un point à part entière de l’agenda de négociations, incluant le suivi et la redevabilité des engagements financiers, ainsi que le soutien adéquat aux pays en développement.” – Groupe de travail de la Constituante Femmes et Genre sur l’adaptation

« Les négociations sur les approches coopératives au titre de l’article 6 ont montré, comme dans d’autres domaines, comment de dangereuses distractions pouvaient se frayer un chemin dans la mise en œuvre de l’Accord de Paris. Nous rejetons les efforts visant à inclure les mécanismes de marché tels que la tarification du carbone et les taxes sur le carbone dans les négociations sur les mécanismes non marchands. Nous préférons donc une absence de décision pour les sous-chapitres liés aux approches de marché plutôt que de laisser émerger des marchés carbone non réglementés et non transparents. Les lacunes du mécanisme de développement propre (CDM) du protocole de Kyoto ne doivent pas être répétées.  Nous soulignons qu’aucune décision vaut mieux que de mauvaises décisions qui pourraient mettre en péril l’intégrité de l’objectif de 1,5°C et qui auraient des conséquences sociales et environnementales néfastes pour les communautés locales. Les activités menées dans le cadre des approches de marché ne doivent pas démarrer tant que nous n’avons pas mis en place des garanties, un mécanisme de plainte indépendant et accessible, des méthodologies ainsi que des lignes directrices étanches ». – Hwei Mian Lim, conseillère indépendante

« Les femmes représentent 43 % de la main-d’œuvre agricole et sont responsables de la moitié de la production alimentaire mondiale, mais elles subissent des discriminations pour accéder à la propriété des terres et des cheptels, au crédit et bien à d’autres choses encore. Les femmes assurent la sécurité alimentaire : un rapporteur spécial des Nations unies a conclu que l’amélioration de l’éducation des femmes est le déterminant le plus important de la sécurité alimentaire. Pourtant, alors que les Parties menaient de longues discussions à la COP28 sur de fausses solutions telles que l’agriculture intelligente pour le climat, l’intelligence artificielle ou encore l’intensification durable, les questions sur l’égalité de genre n’ont reçu que très peu d’attention. Nous sommes déçu⋅es de ne voir aucune décision, une fois de plus, sur une question aussi importante. Nous constatons que le genre, comme c’est devenu la norme pour ce sujet, est mis de côté et ignoré. Nous avons besoin que les Parties arrivent aux intersessions de Juin 2024 – SB60 – avec un plan pour parvenir enfin à une décision substantielle et opérationnelle à la COP29. – Gertrude Kenyangi, directrice exécutive, Soutien aux femmes dans l’agriculture et l’environnement (SWAGEN)

« Nous apprécions la validation par cette décision de la COP28 de la mise à jour de la politique et du plan d’action genre du Centre et Réseau des Technologies Climatiques (Climate Technology Centre and Network – CTCN), qui vise à renforcer les considérations de genre dans le développement et le transfert de technologies climatiques, avec, entre autres, le lancement d’un nouveau registre d’expert⋅es genre et climat. Cependant, nous sommes très préoccupé⋅es par l’accent mis sur l’Intelligence Artificielle pour l’action climatique, à la fois dans le nouveau programme de travail conjoint du Mécanisme Technologique et dans la décision sur le Rapport Annuel Conjoint (JAR). Cette décision, bien qu’elle reconnaisse les risques importants liés à l’utilisation de l’IA, ne garantit aucun mécanisme de sauvegarde approprié pour les écosystèmes et les droits humains ». – Anne Barre, coordinatrice des programmes genre et climat, WECF International 

« Nous sommes très inquièt·es du manque d’ambition que les Parties portent sur ce point de l’agenda.  Les négociations sur le genre continuent d’être traitées comme un outil de marchandage – provoquant un retour en arrière sur le langage, plutôt que de centrer les discussions sur la réponse aux besoins des femmes, des filles et des minorités de genre qui sont en première ligne des impacts climatiques, mais aussi des solutions. Nous demandons aux Parties de s’occuper avec urgence et ambition de la révision et du nouvel engagement à venir pour le Plan d’Action Genre (PAG) de la CCNUCC, en initiant un dialogue significatif centré sur le soutien à la mise en œuvre, aussi bien au niveau national que global pour assurer la cohérence à travers tous les domaines régis par la Convention climatique ».  – Bridget Burns, directrice exécutive, WEDO

« Nous sommes très déçu⋅es par le processus de négociations sur ACE, mais nous convenons qu’une absence de décision vaut mieux qu’une mauvaise décision. Les Parties doivent s’efforcer de remplir leurs obligations, y compris pour le financement de la mise en œuvre du programme ACE, afin de garantir la réalisation des activités dans le cadre d’une approche transformatrice intégrant la dimension genre. Les six éléments du programme ACE- l’éducation, la sensibilisation du public, la formation, la participation du public, l’accès du public à l’information et la coopération internationale – sont essentiels pour assurer la connaissance du climat parmi les jeunes, les adultes et les décideur⋅euses politiques, pour garantir une véritable transition et pour tenir compte des savoirs ancestraux pour protéger les populations et la Terre Mère ». – Floridea Di Ciommo, directrice, cambiaMO  

« Alors qu’un génocide est en cours à quelques milliers de kilomètres de Dubaï – facilité par la militarisation coloniale alimentée par les combustibles fossiles – les appels à la démilitarisation lancés par les organisations de la société civile et les activistes ont été au cœur de cette COP. Des estimations récentes suggèrent que l’activité militaire mondiale alimentée par les énergies fossiles contribue à au moins 5,5 % des émissions mondiales. Cependant, dans le cadre de l’Accord de Paris, la déclaration des émissions militaires reste volontaire, ce qui permet aux armées de bénéficier d’une exemption de facto. Bien que la militarisation exacerbe considérablement la crise climatique, les appels à la réduction et à la réaffectation des dépenses militaires vers l’atténuation, l’adaptation et le fonds pertes et dommages, ou encore les demandes pour plus de transparence et de redevabilité concernant les émissions liées aux dépenses militaires et aux conflits armés ne sont reflétés dans aucun des documents finaux de cette COP. » – Katrin Geyer, conseillère en environnement, Ligue internationale des femmes pour la paix et la liberté (WILPF)

A PROPOS DE LA CONSTITUANTE FEMMES ET GENRE ( WOMEN & GENDER CONSTITUENCY -WGC) 

La Constituante Femmes et Genre, ou Women and Gender Constituency (WGC) est un des 9 groupes observateurs de la société civile de la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC). La WGC a reçu le statut officiel de constituante en 2011. Elle regroupe 44 organisations environnementales et féministes et plus de 800 activistes, travaillant ensemble pour garantir que la parole des femmes soit entendue et leurs droits intégrés dans tous les processus et actes de la CCNUCC, afin de placer l’égalité des genres et les droits humains des femmes au cœur de négociations climatiques. La Women and Gender Constituency représente des milliers de personnes à travers le monde, ses membres sont présent.es à chaque réunion et intersession de négociations pour travailler aux côtés du secrétariat de la CCNUCC, des gouvernements, des observateurs de la société civile et d’autres parties prenantes pour  veiller à ce que les droits des femmes et la justice de genre soient des éléments essentiels de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques. Site web : womengenderclimate.org; ; X (ex-twitter) : @WGC_Climate